Unity, mil neuf cent dix-huit : La mort aux trousses
Scène

Unity, mil neuf cent dix-huit : La mort aux trousses

Maintenant sur les planches du Théâtre Denise-Pelletier, les jeunes âmes de Unity reviennent nous parler de la première guerre dans une mise en scène de Claude Poissant.

Saskatchewan, 1918; année mettant un point d’orgue à cette interminable guerre. Pourtant, dans le petit village de Unity, les jeunes filles hésitent encore entre la terreur de la grippe espagnole et l’exaltation de voir descendre du train les soldats. Par la voix de Béatrice (Jenny Ann Walker), nous suivons jour après jour une infime partie de l’Histoire à travers l’espoir déçu. Histoire de l’humanité peut-être. Car la mort gagne toujours au jeu de l’immortalité.

Béatrice, Sissi, Mary et Michael arpentent avec la naïveté de la jeunesse ce village qui se décime peu à peu. Entre les chariots de cadavres et les croix qui s’accumulent, ceux-ci s’amusent des singularités de leur époque, s’inquiètent peut-être. Mais la mort semble si incompatible avec la vie. Jusqu’à ce que Béatrice découvre qu’elle ne porte aucune flamme en elle. Elle sera témoin du récit de l’enivrement amoureux chez un soldat condamné par la maladie. Elle embrassera alors le jeune homme agonisant.

Étrange objet que Claude Poissant livre à partir de ce texte de l’auteur canadien Kevin Kerr. Choisissant de nous tenir à distance, il nous offre une suite de tableaux laqués, souvent évocateurs, toujours sobres. Quelques cercueils en bois et un ciel rectangulaire constituent ce décor terrifiant de par sa capacité d’évocation. Le scénographe Simon Guilbault et l’éclairagiste Martin Labrecque réussissent à créer une ambiance troublante où la réalité reste figée dans un univers inquiétant. La froideur du matériau verni ajoutée à un jeu toujours détaché de la part des acteurs (particulièrement des actrices) contribue à faire de ce spectacle une œuvre singulière. Si la mise en scène de Poissant offre des moments d’une rigueur esthétique à couper le souffle, il privilégie néanmoins un style brechtien dénué du discours social qui habituellement le sous-tend. Il choisit ainsi de confiner la pièce en une simple chronique où il traduit en images l’angoisse de ces vivants aux prises avec l’inéluctable.

Jusqu’au 15 octobre
Au Théâtre Denise-Pelletier
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