Denise Filiatrault : État financier
Denise Filiatrault signe le coup d’envoi de sa première saison à la barre du Rideau Vert, faisant revivre, avec La Visite de la vieille dame, un genre théâtral disparu.
Denise Filiatrault trouve encore le tour de nous surprendre. Le Théâtre du Rideau Vert étant sauvé grâce à une généreuse donation du groupe Quebecor, la metteure en scène y signe une mise en scène ayant des qualités d’archives tant elle nous ramène au théâtre du milieu du 20e siècle.
Clara Zahanassian, sexagénaire milliardaire (Andrée Lachapelle), est attendue dans le petit village qui l’a vue naître. Les villageois, rongés par la misère, espèrent une contribution financière pouvant mettre un terme à une récession difficile. Or, en échange de ses milliards, la femme demandera au village de mettre à mort l’ancien amant qui l’a éconduite plus de 50 ans auparavant (Jacques Godin). Un marché qui viendra troubler les âmes du patelin.
Denise Filiatrault profite du texte tragicomique de Dürrenmatt pour faire revivre un genre théâtral n’ayant plus pignon sur rue depuis des années. Sur scène, nous verrons défiler une galerie de personnages franchouillards stéréotypés dont le peintre et son béret, le gendarme et son képi, le huissier en mauvais Charlot, le chef de gare et son sifflet, le prêtre et sa Bible, tous hésitant entre l’argot et la diphtongue. La metteure en scène persiste en joignant à cette ribambelle deux nains (Paul Cagelet et Jean-François Boulais) jouant les travestis, pendant que paradent les costumes pailletés de François Barbeau. Du french cancan avec mannequins à froufrous jusqu’aux déplacements de décors en fondu au noir, tout est en place pour les nostalgiques.
Si l’entreprise générale mériterait une plus grande cohérence au niveau du jeu des acteurs, Ghyslain Tremblay se révèle fort habile à manier la caricature sans perdre le trouble du pauvre proviseur qu’il incarne. Le peu de réflexion qu’offre le reste de cette mise en scène se solde néanmoins en une facile allusion au nazisme. En ces temps perturbés par un capitalisme borgne, il faudra aller voir ailleurs pour une lecture plus clairvoyante d’un texte qui mérite davantage.
Jusqu’au 22 octobre
Au Théâtre du Rideau Vert
Voir calendrier Théâtre