Fairy queen : Dancing queen
Fairy queen, un incomparable objet théâtral signé Ludovic Lagarde et Olivier Cadiot.
Ces jours-ci, l’Espace Go accueille Fairy queen, une exceptionnelle "féerie à domicile", un moment de théâtre aussi jubilatoire que déstabilisant. Plus débridée que jamais, la partition – le mot n’aura jamais été aussi juste – d’Olivier Cadiot pétille comme le champagne. À la hauteur de nos attentes – celles suscitées par le passage à Montréal en 2000 de son Colonel des Zouaves -, la mise en scène de Ludovic Lagarde endosse avec virtuosité les audaces d’une langue sans pareille. Bienvenue dans un univers où la poésie est souveraine!
Comme suspendue dans l’espace, celui qui sépare le 21e siècle, le sien, du 20e siècle, celui de Gertrude Stein et sa compagne Alice Toklas, une fée-poète apparaît dans la pénombre du plateau. Tout en survolant Paris, elle réfléchit à la manière d’impressionner ses hôtesses. Quel type de performance pourrait bien surprendre Gertrude Stein, grande prêtresse de la modernité ayant encouragé, avant l’heure, les créations avant-gardistes de Picasso, Matisse et Gris? Voilà une question à laquelle le spectacle répond de manière absolument fantastique. La fée exprime le désir de l’artiste contemporain, celui de remettre en cause les formes conventionnelles, d’entrer de plain-pied dans le 21e siècle, dans ce qui balaierait enfin la postmodernité et qui ne porte pas encore de nom: "Il y a eu le body art, il peut bien y avoir le neuron’art hein? le vocal-en-relief art? théâtre direct-brut? on trouvera un nom plus tard, vaut mieux dire tout simplement Ce sont des poèmes."
Sous nos yeux, Valérie Dashwood exécute une chorégraphie dont l’effervescence de mots, de sons et de mouvements laisse pantois. Elle est stupéfiante de précision, de nuances, de rythme et, avouons-le, de mémoire. À ses côtés, Philippe Duquesne campe une Gertrude Stein irrésistible et Laurent Poitrenaux une Alice Toklas savoureusement bipolaire.
C’est un grand bonheur de savoir qu’il existe des créateurs pour oser exposer un public à un objet à ce point stimulant et différent, à ce point rigoureux et inventif! Lagarde et Cadiot sont de fabuleux agitateurs de particules. Qui pourrait se passer de ces deux spécimens de fée-artiste? Ils ne sont pas encore partis, que l’on espère déjà leur retour.
Jusqu’au 29 octobre
À l’Espace Go
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