Guylaine Savoie : Ombre portée
Avec Un étranger, Guylaine Savoie appose sa griffe sur un quatrième solo où elle n’est plus tout à fait seule…
Près de trois ans après la présentation de sa dernière pièce chorégraphique, Guylaine Savoie ouvre la 24e saison de Danse-Cité avec Un étranger. En cogitation depuis 2003, ce projet fraîchement fignolé lors d’une résidence à la Maison de la culture Mercier se définit comme une sorte de fiction chorégraphique en trois tableaux, où une femme voit son univers basculer lorsqu’elle sent la présence d’un inconnu dans sa demeure. Réelle ou imaginaire, cette présence fait naître un énigmatique duo que la chorégraphe interprète aux côtés de Peter James, explorant les distorsions que fait subir l’effroi au corps et à l’esprit.
Découlant d’une profonde fascination pour les ombres développée lors de la création de Méduse ou la tête de Gorgô (2002) et approfondie avec la réalisation du court métrage Intérieur nuit, un étranger ausculte les méandres de l’inconscient en intégrant la lumière vidéographique aux corps mouvants. "L’ombre est la plus belle façon de parler du corps. Lorsque je vois Peter l’incarner, je sens le drame émaner de lui. Archi-universelle, elle me permet de jouer sur la perception, de me mettre sur la piste de la dualité en créant le doute entre ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas", explique la fondatrice des Productions de la Gorgone, dont l’œuvre est reconnue pour son caractère onirique.
Anti-formaliste, Guylaine Savoie s’inspire du théâtre en s’agrippant à un sujet. S’appuyant sur une série de recherches intellectuelles, visuelles et poétiques, elle parvient à créer, par essais et erreurs, des univers à la fois denses et épurés, comme nous avions pu le voir dans le séduisant Portrait (1999). "Avec Un étranger, j’ai le sentiment d’être davantage incarnée sur le plan gestuel, confie la cofondatrice de Brouhaha Danse. C’est tellement génial de construire et d’interpréter des personnages aussi éclatés. Quel magnifique voyage je me paie!"
Évoluant dans un espace scénographique transmuable, avec des écrans mobiles servant de supports aux ombres et aux projections vidéo, cette nouvelle création n’aurait pu être conçue sans la participation du directeur photo Georges Léonard et du concepteur des décors et des éclairages Éric Belley, de fidèles collaborateurs. Composée d’une œuvre électroacoustique d’André Hamel et d’une pièce d’Irinel Anghel, la trame sonore s’inspire du cinéma fantastique en alliant des sons intragéniques et extragéniques, qui ornent l’atmosphère ambiante.
Portant à la fois les chapeaux de chorégraphe, interprète, réalisatrice et productrice, la pétillante Guylaine Savoie est impatiente de dévoiler son inquiétant huis clos. "Il y a un travail fou derrière cette œuvre. Quand je m’arrête pour y penser, je réalise à quel point nous nous sommes surpassés et j’en suis vraiment très fière. Maintenant, ne reste plus qu’à la partager…"
Au Théâtre La Chapelle
Du 19 au 29 octobre
Voir calendrier Danse