Le Testament du couturier : Retour vers le futur
Le théâtre de la Catapulte présente Le Testament du Couturier de Michel Ouellette, un vibrant solo de la comédienne Annick Léger mis en scène par Joël Beddows.
Récipiendaire du Masque de la production franco-canadienne 2003, la pièce Le Testament du Couturier cumule les succès sur son passage. C’est que le metteur en scène Joël Beddows a fait le pari de diriger la comédienne Annick Léger dans les cinq rôles, transformant ainsi la pièce en un étonnant solo.
Solo d’autant plus insolite que le texte de Michel Ouellette demeure une série de locutions sans réponses. L’auteur a en effet choisi de laisser au public le loisir d’imaginer les répliques des interlocuteurs. "Je crois que cette pièce est une aventure qui permet au spectateur de participer d’une façon peut-être plus active qu’à l’habituelle au théâtre puisqu’il doit absolument combler les silences avec moi", nous explique la comédienne Annick Léger qui assume ainsi trois personnages masculins et deux féminins.
Dans une ville du futur où tout, même l’amour, s’aseptise, cinq personnages seront confrontés aux temps passés. "Parmi les personnages que j’interprète, il y a un couturier qui se voit offrir un ballot par son ami Flibotte, un ballot contenant un patron et un tissu fabriqué à la main. Dans ce monde où nous situe la pièce, tout est fabriqué par des machines. Ce ballot provoquera donc un étrange retour à l’humanité. Flibotte sera en quelque sorte l’instigateur de ce changement. On y retrouve aussi Royal, l’urbaniste qui s’apprête à devenir le nouveau maire de la banlieue, sa femme Miranda et sa secrétaire."
Une galerie de personnages que la comédienne aborde non seulement avec sa pratique corporelle mais également au travers d’un travail vocal rigoureux. "Le travail vocal est d’autant plus important, la scène étant souvent plongée dans la pénombre. Il fallait absolument permettre aux spectateurs d’identifier rapidement les différents personnages pour bien placer l’histoire. Je change de rôle continuellement et un passage me demande même d’interpréter trois personnages à la fois", explique la comédienne qui garde toute la durée de la pièce le même costume, en l’occurrence une simple toge. "Il s’agit de suggérer que le corps, comme la sexualité, n’existe plus, par crainte des maladies."
Il semble que l’œuvre, qu’on pourrait qualifier de science-fiction, se rapproche également des récits mythiques. "C’est rare qu’au théâtre on nous projette dans l’avenir, le théâtre est beaucoup plus un art du passé ou, à la rigueur, du ici et maintenant mais rarement du futur, soutient la comédienne. Cette fable du futur est très simple tout en demeurant extrêmement riche. Le texte explore des thèmes comme la maladie, l’isolement, l’identité, mais aussi l’omniprésence de l’informatique et de la technologie dans nos vies. C’est intéressant parce que c’est un texte qui traite de plusieurs sujets sans donner de réponses. C’est à l’image de sa forme d’ailleurs, une forme qui ne donne jamais accès aux réparties. C’est un texte truffé de silences."
Le metteur en scène Joël Beddows choisit d’accentuer cette fragmentation en isolant des parties du corps de la comédienne par l’éclairage. Ainsi, l’accent sera parfois mis sur les pieds ou la tête de la comédienne. "La scénographie et les éclairages me facilitent énormément la tâche, affirme Léger qui pourtant cumule les performances solos. Joël Beddows a opté pour une esthétique purifiée, un peu à l’image de cet univers futuriste que nous propose Michel Ouellette dans son texte. Cette scénographie me permet un contact différent avec le public. Elle me met étrangement en confiance."
Le 25 octobre
À la Salle Maurice-O’Bready
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