Claude Poissant : Traitement de texte
Claude Poissant guide de nouveau Le Traitement de Martin Crimp sur la scène du Théâtre Espace Go.
En mai dernier, dans le cadre du 11e Festival de théâtre des Amériques, Claude Poissant dévoilait sa mise en scène du Traitement, une pièce particulièrement cinglante du Britannique Martin Crimp. Présenté seulement quatre soirs, le 47e spectacle du Théâtre PàP avait reçu les éloges mérités de la critique et des festivaliers. Ces jours-ci, la production reprend l’affiche du Théâtre Espace Go pour 22 représentations.
Toujours à l’affût de nouvelles écritures, de nouvelles façons d’appréhender un monde en constante mutation, le directeur du Théâtre PàP dévore littéralement les textes de ses contemporains. Au cours des 25 dernières années, l’homme a grandement contribué à la création et au développement de la dramaturgie québécoise. Avec Le Traitement, le metteur en scène s’écarte de ses habitudes et plonge tête première dans le déroutant microcosme imaginé par un auteur britannique de sa génération pour nous offrir l’une de ses réalisations les plus maîtrisées et les plus dérangeantes. Il semble y avoir entre Poissant et l’écriture de Crimp – judicieux amalgame d’humour britannique et de cynisme à l’américaine – une espèce d’affinité naturelle. "C’est un univers qui m’a tout de suite beaucoup plu, lance-t-il. Martin Crimp a du plaisir à raconter une histoire, un plaisir que je ne retrouve pas souvent." Le dramaturge possède une œuvre très diversifiée et pourtant fort cohérente, une quinzaine de pièces dont la plupart ont été jouées un peu partout dans le monde.
Doté d’une trame narrative particulièrement fragmentée, Le Traitement enchevêtre violence et dérision, puise aux ressorts d’une angoisse dévorante et d’un humour corrosif. Dans les hauteurs de la Big Apple, une métropole aussi exaltante que cruelle, deux producteurs de films, des adeptes de cinéma-vérité, bombardent Anne de questions indiscrètes. Avec les détails de sa terrible histoire, avec toutes les parcelles d’humanité qu’ils auront réussi à lui dérober, le couple compte produire une œuvre d’art. Il n’y a pas à dire, nous nous trouvons bel et bien en plein cœur de la société du spectacle. "Il y a mille sujets dans cette pièce, estime Poissant. Toutefois, s’il faut isoler un thème central, ce serait les rapports entre la fiction et la réalité, autrement dit le sujet le plus cliché qui soit. Pourtant, il n’a jamais été abordé sous cet angle. Crimp n’est pas moralisateur. Alors que ses personnages auraient tout pour être d’énormes stéréotypes, ils ne le sont pas un instant. Jamais il ne les juge, pas plus qu’il ne les met sur un piédestal."
Confronté à la traduction franco-française d’une pièce britannique dont l’action se situe à New York, Claude Poissant a éprouvé le besoin de retraduire le texte, de "retraverser l’océan et de revenir en Amérique". Voilà qui explique que le créateur a ajouté une corde de plus à son arc et signé sa première traduction. Discrète, la participation du chorégraphe Dave St-Pierre à l’élaboration du spectacle n’en demeure pas moins importante. Bien qu’il ait fallu retrancher la majeure partie de ses propositions, la représentation tout entière se ressent du travail effectué avec des interprètes par le jeune prodige de la danse contemporaine montréalaise. "Dave les a guidés dans l’expression du chaos, du rythme new-yorkais, des changements brusques, de la surprise, de la peur, affirme le metteur en scène. Tout cela est resté dans leurs corps." Les corps en question, ce sont ceux de Peter Batakliev, Félix Beaulieu-Duchesneau, Violette Chauveau, Amélie Chérubin-Soulières, Francis Ducharme, Catherine Larochelle, Widemir Normil, Gilles Renaud et Catherine Trudeau. Une distribution hors pair.
Du 4 novembre au 3 décembre
À l’Espace GO
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