Leçon d’anatomie : Sous le microscope
Leçon d’anatomie, mise en scène par Marie Gignac, invite le spectateur dans une intimité étonnante: celle de Martha, portée par une Lise Castonguay lumineuse.
Dès l’entrée dans la salle, étonnement: sur une scène évoquant le devant d’un amphithéâtre, éclairage très blanc, clinique; au centre, une table, recouverte d’un drap sous lequel se dessine un corps. La froideur de l’image, l’effet de réel créé par le décor de Jean-François Labbé provoque un léger inconfort: l’illusion, pendant un court moment, qu’on va assister à une dissection, avec explications sur les deux tableaux du fond. Idée assez juste, d’ailleurs, puisque Martha, professeure de biologie, fait l’autopsie de sa relation avec Pierre, son mari, la transforme en leçon d’anatomie: anatomie de leur couple, analyse de ses souffrances. Par un texte souvent très beau (Larry Tremblay), imagé, sur un ton parfois intimiste, souvent ironique et lucide, ou avec l’aplomb de la démonstration, Martha se confie. Pendant qu’elle parle, images diverses et extraits de film (Francis Leclerc) sont parfois projetés sur les tableaux.
Lise Castonguay plonge sans retenue dans le secret de ce personnage: incarnant avec grâce la scientifique brillante, en parfait contrôle, elle se glisse avec profondeur et sensibilité dans la souffrance de la femme blessée. Seule en scène, elle instaure avec le public un contact franc, plein de chaleur, de complicité.
Malgré la qualité de son interprétation, sensation de malaise, pourtant, au sortir du spectacle. À cause de l’aspect clinique de la proposition, qui contraste avec la profondeur, l’intimité des propos, et nous donne l’impression d’être voyeur? À cause du côté parfois démonstratif de la mise en scène, notamment par les photos et extraits de film projetés? Souvent très belles et intéressantes, ces images apparaissent un peu superflues lorsqu’elles ne font qu’illustrer ce que Martha est en train de raconter. Ou serait-ce, enfin, à cause du mannequin accompagnant le personnage dans sa démonstration qui, réduisant Pierre à une caricature d’homme, semble amoindrir le drame de Martha?
Difficile à dire. Leçon d’anatomie demeure néanmoins un spectacle troublant, culminant dans une finale magnifique: tout s’y orchestre pour créer l’image saisissante et forte d’une libération.
Jusqu’au 26 novembre
Au Théâtre de la Bordée
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