Marie-Hélène Poulin : En pièces attachées
Scène

Marie-Hélène Poulin : En pièces attachées

Marie-Hélène Poulin signe et dirige Comédie et Dramaticules, une pièce où s’instaure un dialogue entre l’univers de Beckett et la vie d’Ionesco. Morceaux choisis.

Ce sont diverses découvertes, comme autant de coïncidences jetant des ponts entre l’œuvre de Beckett, la vie d’Ionesco et sa propre expérience, qui ont donné à Marie-Hélène Poulin l’idée de Comédie et Dramaticules: le fait qu’ils étaient amis, l’importance que, comme elle, le second accordait au rêve… "Et tout à coup, j’ai vu le dénominateur commun: la perte d’êtres chers, le père", précise-t-elle. C’est ainsi qu’en se basant sur trois courtes pièces de Beckett, Comédie, Solo et Catastrophe, de même que sur les journaux personnels d’Ionesco, elle a construit ce spectacle nous conviant à une manière de recherche archéologique sur la condition humaine, la vie et la mort, à travers la quête de son héros. "Parce que Ionesco lui-même tente de se retrouver. Dans un de ses journaux, il dit qu’il fait une fouille et qu’il cherche les débris de sa préhistoire, qu’il tente de recoller ça", illustre-t-elle.

Au gré d’une accumulation de fragments, entre lesquels elle a cherché à créer une réelle unité, sa pièce nous fait ainsi pénétrer dans la vie et la tête du personnage, tandis qu’il se rend à l’enterrement de son camarade. "C’est un spectacle qui lance des images. J’aime beaucoup proposer quelque chose au public pour qu’il ait la liberté, selon sa sensibilité, de se coller sa propre histoire. Par exemple, au moment où la première pièce commence, Ionesco entend parler des créatures et, de par ce qu’elles disent, a l’impression que c’est son père qui lui apparaît, comme il le faisait souvent dans ses rêves après sa mort. Alors, il s’engage dans une espèce de dialogue à sens unique. Donc, le propos des pièces de Beckett, correspondant curieusement à sa vie réelle, enclenche ses souvenirs", observe la metteure en scène qui, lorsque vient le temps de qualifier l’atmosphère de l’ensemble, parle d’une forte impression d’étrangeté et d’onirisme, où perce cependant cet humour propre aux deux dramaturges.

De même, le décor laisse lui aussi place à l’interprétation: Est-ce un cimetière? Un site archéologique? Une chose est certaine, "on fouille, on gratte, on est dans le sable, dans la terre", à la recherche, toujours, de ses origines. Mais là où la pièce se démarque le plus, c’est en faisant de la scénographe et de l’éclairagiste des personnages à part entière. "On s’est demandé: "Est-ce que les concepteurs peuvent influencer les acteurs dans leur jeu et vice versa?" Parce que, ce que je trouvais terrible, c’est qu’on a des complices extraordinaires, mais que chaque fois qu’un spectacle commence, pour eux, c’est terminé", évoque-t-elle. Une exploration à la suite de laquelle ils en sont venus à imaginer une formule où "le public va voir l’interaction des concepteurs qui transforment, entrent en communion avec les comédiens, et les deux vont se permettre d’évoluer tout au long des représentations. Ces acteurs-là – qui ne sont pas des acteurs – sont intégrés à la création. Ce ne sont pas des accessoires ou un caprice de mise en scène, ils font vraiment partie du développement de l’histoire", insiste-t-elle. De quoi intriguer…

Du 15 novembre au 3 décembre
Au Théâtre Périscope
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