Cyrano : Cyrano, l’éternel
Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand est sans doute l’un des plus beaux textes classiques, mais il est aussi l’un des plus casse-gueule. Le TGP le monte par désir de défi.
Écrit par Edmond Rostand au XVIIe siècle, Cyrano de Bergerac a traversé les âges. Encore aujourd’hui, le personnage trouve une place de choix dans l’imaginaire autant des adultes que des écoliers. Monter cette pièce représente donc un défi de taille. Car il faut déconstruire l’image de l’homme au grand nez qui aime en secret sa cousine Roxane (Marie-Andrée Leduc), entretenue par chaque individu, et réussir à faire voler en éclats des attentes.
Du coup, on peut se questionner sur les raisons qui ont poussé le Théâtre des gens de la place à s’attaquer à cette œuvre magistrale. Un besoin de se retrouver en déséquilibre? Une soif d’accomplir un geste héroïque? Patrick Lacombe, qui a coréalisé la mise en scène avec Éric Langevin et qui campe le valeureux soldat, répond: "C’est un défi. Pourquoi bâtit-on une maison quand on sait qu’on pourrait rester en appartement toute notre vie? Cyrano, c’est le rôle que tous les comédiens voudraient jouer, mais que peu osent faire. Il y a plein de comédiens qui jouent dans leur zone de confort. Ils sont toujours bons, ils sont toujours corrects. Ils n’essayent jamais rien. Moi, comme comédien, j’ai eu beaucoup de plaisir à jouer dans Douze Hommes en colère, dans Le marquis qui perdit, dans Marcel poursuivi par les chiens, dans Traces d’étoiles et là, dans Cyrano de Bergerac. Ce sont toutes des affaires différentes, et les trois quarts sont des affaires casse-gueule. Et ça m’est arrivé de me péter la gueule. Mais c’est là l’intérêt d’être acteur. La maturité vient comme ça!"
À quelques jours de la première, Patrick Lacombe est habité par une angoissante fébrilité. "Ça devient un personnage qui est plus grand que nature. Et quand il est sur scène, il faut qu’il soit comme ça. Alors, ça demande une énergie extrême. Je savais que c’était ça. Mais avant de le jouer, tu ne peux pas vraiment te l’imaginer. Ça devient épuisant d’être toujours au-dessus de tout et de tout le monde." Il poursuit: "C’est un beau personnage, mais qui est très complexe. Il est facile à comprendre. C’est quand tu commences à le jouer que ça devient complexe. C’est un personnage de roman, donc on ne peut pas se rattacher à quelqu’un d’existant. Ce n’est pas humain comme type de gars. Il est extrêmement romantique. C’est un soldat. C’est aussi quelqu’un qui est très fort, une fine lame. Il est un combattant hors pair qui, en même temps, est poète, scientifique, philosophe… Il le dit lui-même: "Philosophe, bretteur, rimeur, voyageur aérien, grand riposteur du tac au tac…" C’est tout ça en même temps, le personnage. Et il finit en disant: "Qui fut tout et ne fut rien." Puis, Cyrano, c’est en plein ça: "Qui fut tout et ne fut rien.""
Question de s’adapter aux standards d’aujourd’hui, le TGP présente une version raccourcie du texte de Rostand. Si le squelette de la pièce a légèrement été modifié, le propos, lui, demeure plus que jamais pertinent. "C’est un texte qui est très actuel. Ça parle du mal d’être, de comment on fait pour vivre avec des blessures à l’âme et de comment on fait pour surpasser ça. Avec le taux de suicide qu’on a, c’est très actuel. Moi, je pense que les jeunes devraient s’identifier énormément à Cyrano", clame le comédien.
Les 1er, 2, 3, 8, 9 et 10 décembre
À la Maison de la culture de Trois-Rivières