Les Mystères du Quat’Sous : Partons à l’aventure
Les Mystères du Quat’Sous, inspiré de l’histoire du théâtre du même nom et présenté à la même enseigne, propose un feuilleton loufoque en cinq épisodes. Rencontre avec l’auteur, Pascal Brullemans.
"Les acteurs ne font la scène que deux fois en répétition, et ensuite ils l’enchaînent deux fois. Alors quand on voit le spectacle le vendredi soir, c’est pratiquement un enchaînement. Ce qui fait qu’il y a des erreurs et des pertes de texte, mais ça fait aussi partie de la formule. Les gens le savent, c’est à 23 h, et on vit une aventure!" raconte Pascal Brullemans à propos de l’espèce de fête théâtrale qu’est ce feuilleton mis en scène par Éric Jean. Le premier épisode, aussi débridé que permissif, se passait à Paris et tournait autour de la mort du poète Charles Baudelaire, alors que le second débute par le naufrage au large de Rimouski d’un paquebot qui se dirigeait vers Montréal.
"Pour le premier épisode, les références étaient plus littéraires (La Dame aux camélias et Charles Baudelaire), avec une forme près de celle des auteurs du début du siècle, alors que le deuxième est plus brechtien, avec des scènes de groupe, et là, on arrive à Montréal et on "pogne" le joual!" nous dit Brullemans en précisant que le premier épisode sera résumé non seulement dans le programme, mais sur scène avant le début du second, avant d’ajouter en riant que "ça va peut-être même être beaucoup plus clair ainsi pour les gens qui ont vu le premier spectacle"! Vous l’aurez compris, avec ce genre de formule, les spectateurs acceptent de vivre une aventure singulière, et c’est dans cette ambiance de risque que tout le monde prend son pied.
"La première fois que j’ai fait quelque chose avec Éric Jean, c’était Cassis, il y a dix ans… À ce moment-là, je sortais de l’école, où j’avais appris que la Poune faisait un spectacle par semaine au Théâtre National. Je me disais: le théâtre, ça peut être compliqué, mais ça peut aussi être très simple. Et puis l’idée des feuilletons était de faire du théâtre, mais quand je dis faire, je veux dire: faire! Et à ce moment-là, les gens y vont et ils prennent un risque, mais c’est extrêmement vivant!" Avec le feuilleton, l’équipe plonge et offre aux spectateurs un travail en évolution sans prétention et parfois près de l’improvisation, mais sans la compétition qui vient avec le genre. "Comme pour l’impro ou pour Gilles Latulippe, le public n’est pas nécessairement composé de connaisseurs, c’est un public de gens qui tripent! Pour Cassis, on avait des gens de tous les milieux qui suivaient le feuilleton. Je dirais même que pour un esthète… ça peut être un peu raide!"
Dans ce climat de franche camaraderie et d’exploration, la troupe peut tout essayer car elle n’a ni moyens financiers ni pression commerciale: "La seule véritable contrainte, c’est le temps. Il faut faire un spectacle à tous les mois et demi, et ça, c’est un rythme d’écriture inhabituel." Mais si le rythme de création est formateur, il est pratiquement bionique: "Je ne sais pas pour les comédiens, mais comme auteur, je vois ça comme du cardio. On dit souvent que c’est douloureux d’écrire ou de faire du théâtre; là, c’est un entraînement où l’on n’a pas le temps d’avoir mal! C’est du sport extrême, on se lance et on réussit." Si chaque scène est une occasion d’explorer une idée, il faut posséder des réflexes extraordinaires ("On jette le quatrième mur par terre avec une masse! Ce n’est pas toujours subtil…") et savoir se mesurer à la liberté totale de création de tous et chacun, sans filet de sécurité autre que ses moyens artistiques: "Habituellement, les shows d’Éric sont des machines extrêmement réglées, on travaille en se posant une foule de questions sur le sens et la technique; ça fait drôle de se retrouver avec la même équipe dans une formule où on se lâche lousse!"
Du 25 au 27 novembre
Au Théâtre de Quat’Sous
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