La Promesse de l'aube : Tu seras un homme, mon fils
Scène

La Promesse de l’aube : Tu seras un homme, mon fils

Avec La Promesse de l’aube, André Melançon fait une entrée sobre et touchante dans la sphère théâtrale.

En lisant La Promesse de l’aube, un roman autobiographique publié par Romain Gary en 1960, le cinéaste André Melançon a vu surgir devant lui des personnages de théâtre. Parmi ceux qui prennent actuellement vie sur la scène de l’Espace Go, il y a Roman Kacew, l’homme qui deviendra Romain Gary: militaire, diplomate, auteur de 33 romans et deux fois récipiendaire du Prix Goncourt, et Nina Borisovskaia, sa courageuse mère. En portant à la scène le livre de Gary, vibrant hommage à une mère "plus grande que nature", Melançon parvient à élucider un peu de ce mystère que constitue l’inébranlable amour maternel.

Sur la plage de Big Sur, impressionnante butte de sable érigée par Guillaume Lord et gorgée de soleil par Éric Champoux, Romain Gary, la quarantaine, revient sur ses années de formation. L’écrivain est pour ainsi dire visité par ses fantômes, des revenants bienveillants avec qui il partage une attendrissante complicité: la mère, immigrante russe qui nourrit pour son garçon des aspirations sans bornes, Romain enfant, Romain dans la vingtaine et plusieurs autres, de passage. Chargé de vêtements, de splendides costumes créés par Ginette Noiseux, et d’objets, des accessoires savamment choisis par Normand Blais, le groupe a toutes les apparences d’une troupe de comédiens venus prêter vie aux histoires de Gary. Limpide, sans fioritures, l’adaptation de Melançon, sans transcender complètement ses origines littéraires, nous fait pleinement communier aux poignantes, et souvent très drôles, confessions d’un enfant du siècle. Sobre, la mise en scène demeure entièrement dévouée au lien unique et pourtant universel qui se tisse entre une mère et son fils.

Dans la peau d’une mère combattante, engagée corps et âme dans l’amélioration des conditions de vie de son fils, déterminée à élargir ses perspectives, Andrée Lachapelle s’avère grandiose. Adoptant juste ce qu’il faut d’âme et d’accent russes, la comédienne se montre aussi à l’aise dans la terrible rigidité d’une femme qui, comme elle ne cesse de le répéter, "sait ce qu’elle dit" que dans les moments où se dévoile son immense tendresse maternelle. Malheureusement, l’interprétation de Patrick Goyette n’est pas à la hauteur du rôle qu’on lui a confié. Le soir de la première, visiblement embarrassé par le ton littéraire qu’exige sa fonction de narrateur, l’acteur butait sur les mots, paraissait manquer de souffle, débitait son texte d’une manière souvent monotone. Des maladresses qui, il faut bien l’admettre, freinent la montée dramatique de certains moments. Dans la peau de Gary adulte, Maxim Gaudette émerveille. Ses scènes sont de loin les plus émouvantes du spectacle. Enchaînant les personnages les plus divers, le chevronné Paul Savoie et la nouvelle venue Sharon Ibgui se métamorphosent en évitant chaque fois la caricature. Dans la peau de Gary enfant, rôle qu’il assure en alternance avec Gabriel Favreau, Aliocha Schneider s’en tire fort bien. Bref, André Melançon effectue vers le théâtre un passage tout à fait concluant.

Jusqu’au 4 février
Au Théâtre Espace Go
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