La Tête blanche : Les règles du jeu
La Tête blanche à La Licorne: entre réalité et fiction, la vérité se perd!
Il est difficile à décrire, mais il est palpable, le malaise que provoque La Tête blanche, un docu-fiction théâtral inspiré de la vie de Louise-Édith Hébert et présenté par la troupe Qui va là. Non seulement le sujet n’est-il pas des plus faciles à absorber, puisqu’il parle du vieillissement et de l’effritement, mais surtout, le côté "docu" de cette fiction épouse plusieurs visages de la réalité que la proposition nous force à regarder dans le blanc des yeux. Tout d’abord, il y a cette histoire non chronologique et assez débridée qui raconte, sans fard ni couleur, de manière presque clinique, le récit d’une vie aussi riche que difficile. Ensuite, cette histoire, inspirée de faits réels, est interprétée par celle qui l’a vécue, Louise-Édith Hébert. Et comme si nous n’étions pas suffisamment dans la vérité, eh bien, Louise-Édith Hébert, qui est une militante engagée, n’est pas une professionnelle de la scène. Le problème nous frappe de plein fouet par un paradoxe même: la vérité ne sonne pas toujours juste lorsqu’elle n’est pas jouée.
En fait, elle joue, Louise-Édith. Mais si la troupe avait plutôt appuyé par des scènes théâtrales une narration, davantage qu’un jeu entre deux chaises, le malaise inévitable aurait porté fruit au lieu d’accentuer un fossé difficile à traverser. On aurait parlé de pont, de lien, alors que là, on nage et on rame entre deux rives éloignées: celle du théâtre et celle du témoignage. Et pourtant, l’entreprise était de rapprocher des mondes, ceux des générations et des réalités.
Il y a pourtant des moments de théâtre dans ce spectacle qui fonctionnent très bien, comme ces instants de confusion, plongés dans le noir entre des montées de musique et des tirades éparses, qui bousculent vraiment. La sobriété de la mise en scène, qui allie chaleur et démonstration du réel, est également réussie. Le texte et les idées véhiculées sont pertinents, de même que le concept, aussi risqué qu’engagé. Seulement, m’est avis que les créateurs du très bon Toutou rien auraient gagné à situer le dialogue entre Louise-Édith et les comédiens ailleurs, évitant la distance entre les différentes qualités de jeu qui sont accentuées ici par les échanges sur scène. Ainsi, la rencontre se ferait aussi entre le public et eux.
Les 22 et 23 janvier et du 11 au 27 février
Au Théâtre La Licorne
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