Le Grand Guignol : Le théâtre aux horreurs
Scène

Le Grand Guignol : Le théâtre aux horreurs

Avec Le Grand Guignol, le Théâtre du Trillium propose un septième Laboratoire de mise en scène qui recrée les obsessions et les peurs du théâtre d’autrefois. Rencontre avec les deux alchimistes du labo, Mathieu Charette et Benjamin Gaillard.

À la fois lieu fondé dans Pigalle à Paris en 1897 et genre, le Théâtre du grand guignol innovait en abordant les thèmes noirs et les peurs de la société – psychoses, maladies, pertes de contrôle, panique, mort… – et en mettant en scène des personnages atypiques tels que des vagabonds, des prostituées, des criminels, des gosses de rue, etc.

Mathieu Charette et Benjamin Gaillard, qui aborderont ce style théâtral dans leur Laboratoire de mise en scène, le définissent en leurs mots: "C’est un théâtre très réaliste du début du XXe siècle, qui coïncide avec l’apparition des premiers metteurs en scène. Dans une idéologie naturaliste, c’était un théâtre pour créer la peur", explique Mathieu Charette.

"Plusieurs metteurs en scène et écrivains du temps étaient des médecins ou des psychologues expérimentaux", ajoute Benjamin Gaillard. "André de Lorde appelait ça du "théâtre médical"; on y "découpait" beaucoup de gens. Et il y avait une approche pour critiquer la médecine, situant l’action dans des asiles ou des hôpitaux", renchérit Mathieu.

La directrice du Théâtre du Trillium, Sylvie Dufour, qui voulait faire revivre ce chaînon méconnu du théâtre, a proposé une pièce à chacun des metteurs en scène. Mathieu Charette s’attaque donc à un drame avec La Loterie de la mort d’Eddy Ghislain et Pierre Larocque. Il s’entourera des comédiens Daniel Arnaud, Marc-André Charette, Théo Martin, Édith Villeneuve, Yves Gilbert, Daniel Laurin, Marc Tremblay et André St-Onge. "Mon extrait se déroule dans un studio de barbier, en France, dans les années 50. Le propriétaire a décidé de décimer les anciens amants de son ex-femme. On est un peu devant l’ironie: la profession du coiffeur l’invite à l’amabilité complimenteuse, à converser avec le client pour lui faire passer un beau moment, alors que cet esprit de vengeance va éclater en cours de route", raconte Mathieu Charette.

Benjamin Gaillard

Benjamin Gaillard fera dans la comédie avec la présentation d’Isolons-nous Gustave!, d’André Mouëzy-Éon, avec les comédiens Nathaly Charette, Richard Léger et Marie-Thé Morin. "C’est vraiment inspiré d’un vaudeville. Ça se déroule dans la chambre d’un couple bourgeois. Un orage se prépare et la femme a une phobie horrible du tonnerre. Pour se protéger, elle fait venir sa bonne, qui a une relique qui peut les protéger si les personnes dans la chambre n’ont rien à se reprocher. L’homme n’est pas inquiet, il n’a rien à cacher, il n’a pas peur du tonnerre et trouve ça enfantin. Mais on va vite se rendre compte que les personnages se cachent des choses…" raconte Benjamin.

Selon les deux metteurs en scène, qui se sont vraisemblablement donné un mal fou à faire de la recherche sur le genre, se tapant une encyclopédie complète et des heures devant l’ordi, l’héritier du Théâtre du grand guignol serait sans doute aujourd’hui le film d’horreur. "Les films de série B de notre époque pour lesquels il y a un culte. C’était un peu la même chose en ces années-là: un peu d’érotisme mêlé au sadisme, suggère Benjamin. Beaucoup de clichés qui existent aujourd’hui relèvent aussi de ce genre."

Mathieu poursuit: "Pensons par exemple à l’histoire d’un journaliste qui va parler à un docteur célèbre, dans un asile, pour découvrir qu’il y a une révolution dans l’hôpital et que les fous ont pris la place des docteurs. Ce genre de revirement de situation vient du Théâtre du grand guignol."

Chaque extrait est d’une durée d’environ 25 minutes, et la présentation, divisée par un entracte, sera suivie d’une discussion avec le public.

Du 8 au 12 février à 20 h
À la Nouvelle Scène
Voir calendrier Théâtre