Catherine Tardif : Matière brute
Catherine Tardif nous invite à une nouvelle incursion dans l’univers éclaté de ses tribulations artistiques. Ça s’intitule Le Show triste et ça ne fait pas pleurer.
Si vous aimez être dérouté par une danse très théâtrale et comprendre à demi-geste ce qui se déroule sur scène tout en vous demandant si ce n’est pas autre chose qui s’y passe réellement, vous êtes déjà un fan de Catherine Tardif ou vous êtes en passe de le devenir. Depuis une dizaine d’années, chacune de ses créations explore un genre ou un thème connu de tous. Après les crooners de Décorum, la musique heavy métal de Trio métal et le far west du Show western, la voilà qui déballe toute la tristesse du monde. Paradoxalement, c’est tout sauf déprimant. "Toutes les émergences tristes ont pris leur place dans la pièce, explique la chorégraphe, mais c’est vraiment comme récolter la fleur de sel une fois que l’eau se retire et qu’il ne reste que le cristallin. On voit la part de tristesse, mais c’est tellement amusant que ça me donne le vertige. J’hésite d’ailleurs à parler de ça parce que je ne cherche pas particulièrement à faire rire, mais c’est ce qui arrive finalement à la plupart de mes shows."
L’idée de la tristesse lui est passée par la tête comme la dizaine d’autres qui attendent sur ses tablettes de devenir spectacle. Car pour Catherine Tardif, tout est prétexte à créer, un de ses principaux objectifs étant d’offrir aux artistes comme aux spectateurs une expérience intense. Travaillant à partir d’improvisations, elle va donc chercher chez ses interprètes des images représentatives de la psyché collective. "J’aime étaler une imagerie de base qui sert de tremplin aux interprètes, aux collaborateurs et aussi au public, commente la créatrice. D’après mon expérience, c’est une merveilleuse façon d’ouvrir l’espace entre la salle et la scène parce que le spectateur est dans une position de participant du fait qu’il a déjà une opinion sur le sujet traité. Mon travail consiste à le conforter, à le surprendre, à le brasser…"
Cherchant indubitablement à stimuler la réflexion du public, Catherine Tardif souhaite que le processus se fasse dans le plaisir et elle espère des spectateurs une "écoute active et joyeuse". Mais loin de leur offrir un pur divertissement, elle les accroche avec un travail assez brut qui ne laisse personne indifférent. "En général, le premier jet lancé en studio reste jusqu’à la fin et son organisation semble assez négligée en apparence. Il y a beaucoup d’interruptions brutales de scènes, la gestuelle n’est pas particulièrement esthétique, les costumes d’Angelo Barsetti, pas forcément beaux, la musique de Michel F. Côté est déviée de ce qui est propre… J’aime donner l’illusion que tout a été jeté là et laissé en l’état. Toutes ces anomalies provoquent le sourire, l’attendrissement et rendent le public encore plus empathique avec ce qui se passe sur scène."
Pour servir cette nouvelle coproduction avec la compagnie Danse-Cité, la chorégraphe s’est entourée de professionnels de haut vol dont la plupart sont de vieux complices: les danseurs Marc Boivin, Sophie Corriveau, AnneBruce Falconer et Guy Trifiro, également comédien, l’acteur physique Peter James et l’éclairagiste Marc Parent. Une petite famille qui vous souhaite autant de plaisir à voir Le Show triste qu’elle en a eu à le créer.
Du 8 au 11 et du 15 au 18 mars
Au Théâtre La Chapelle
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