Luc Moquin : Sorties de secours

C’est à la suite d’une commande du Théâtre La Catapulte que le jeune auteur Luc Moquin a choisi d’amalgamer deux de ses pièces en chantier pour en former une seule. D’abord, Confiance!, qui met en scène un sextuor de spectateurs qui pestent contre le piètre spectacle qu’on leur a donné à voir et qui rêvent de la glace qu’ils pourront déguster une fois le spectacle terminé – ils n’osent quitter la salle pendant l’entracte, craignant les représailles. Luc Moquin a couché la première ébauche de ce texte dans le cadre d’un 24 heures de théâtre à l’Université d’Ottawa, où des étudiants avaient 12 heures pour écrire une courte pièce qu’on mettait ensuite en scène au cours d’un autre 12 heures. L’organisateur étant anglophone, Luc Moquin était dépité par la thématique proposée, estimant que le mot confiance n’avait pas les mêmes résonances en français que le thème trust suggéré… Il décida d’en rire: "Le thème est alors devenu une espèce de refrain que l’on entamait comme s’il y avait eu une illumination et, tout d’un coup, c’est devenu des personnages qui parlaient d’un spectacle qui s’appelait Confiance! Déjà là, il y avait une mise en abyme du thème, qui devenait une pièce qu’ironiquement on n’avait pas vue, mais que les gens sur la scène, eux, venaient de voir", explique Moquin. L’auteur ajoute que la nature de l’exercice lui a alors imposé des contraintes qui ont fortement influencé la structure et la forme du texte, à savoir le choix d’un simple lieu et la quasi-absence de décor. Ce premier texte a ensuite été primé par le Théâtre La Catapulte lors de son concours d’écriture dramatique.

À cela s’imbrique donc un autre texte brouillon, Bang!, que Moquin a jumelé à Confiance! à raison de plusieurs laboratoires et résidences d’écriture tenus dans des centres culturels francophones de l’Ontario. Bang! met en scène six personnages perdus qui déambulent, s’entrechoquent et se recoupent dans cet endroit que l’on nomme le "fond du baril". "Je suis parti de situations très simples, où les corps pouvaient servir à la fois de décor, de personnages, de porte-parole… Ce sont des anti-personnages, dans le sens où ils sont essentiellement des voix. Comme dans un canal de pensées où tout est concentré, les personnages agissent comme porte-voix."

Ce texte donnait aussi suite à l’exploration scénique sur les onomatopées qu’avait entreprise Moquin: "L’idée était d’utiliser un élément discursif qui n’a aucune valeur sémantique. Quand on dit "Bang!", ça n’a aucun sens, sauf que ça renvoie à une image très forte. Je voulais donc construire des images scéniques à partir d’un texte qui a priori n’a aucun sens."

Ainsi, de cet amalgame résulte Exit(s), une pièce qui a subi des modifications jusqu’à la dernière minute. "Il y a eu le problème de trouver une fin à cette histoire-là. Je me suis un peu défilé puisque j’ai refilé mon problème aux personnages, en leur disant "Arrangez-vous". Je n’arrivais pas à trouver une fin satisfaisante puis, en même temps, comme il n’y a presque pas d’histoire, donner un dénouement, c’était imposer une possibilité que je ne voyais pas…" La production, créée à deux têtes – Joël Beddows (Le Testament du couturier, La Société de Métis) et Geneviève Pineault (L’Hôtel) -, entamera, après Ottawa, une tournée de sept villes en Ontario. Les comédiens qui donneront corps aux deux sextuors de personnages sont Daniel Aubin, Carol Beaudry, Chanda Legroulx, Magali Lemèle, Pierre Simpson et Stéphanie Kym Tougas. "J’ai un peu coupé l’herbe sous le pied aux metteurs en scène en imbriquant les deux textes. Ils se sont retrouvés avec un seul texte et donc avec une cohérence à trouver entre les deux univers", constate l’auteur, qui se dit tout de même des plus confiants par rapport au produit final.

Du 2 au 11 mars à 20 h
À La Nouvelle Scène
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