Hugo Bélanger : Nations unies
Scène

Hugo Bélanger : Nations unies

Hugo Bélanger signe la mise en scène de La Princesse Turandot, une fantaisie où il fusionne allègrement les traditions orientales et occidentales.

Quand Hugo Bélanger découvre la commedia dell’arte, à l’âge de 17 ans, par l’intermédiaire d’une pièce de Marc Favreau intitulée La Combine de Colombine, il sait qu’une longue histoire d’amour vient de s’enclencher. "Ce qui est merveilleux avec la commedia dell’arte, c’est son caractère à la fois fantastique et social." En fait, ce qui attire tout particulièrement le créateur, c’est la manière dont le genre prédispose à l’affabulation. "J’aime faire rêver les gens. J’aime les emmener dans un monde imaginaire. Si plusieurs artistes de ma génération retournent à l’acrobatie, au théâtre d’objets, à la marionnette, aux ombres, au masque et au clown, c’est que tout cela est profondément théâtral. Ce sont les grandes traditions occidentales, mais on a tendance à considérer tout cela comme des arts mineurs. En réalité, c’est ce qui nous touche le plus, parce que ça retourne à la source, à l’imaginaire, à ce qui nous fait rêver au plus haut point."

En 2004, à la Salle Fred-Barry, Hugo Bélanger avait charmé le public et la critique en s’appropriant de main de maître L’Oiseau vert de Carlo Gozzi. Ces jours-ci, le metteur en scène retrouve l’univers de ce grand auteur de la commedia dell’arte du 18e siècle, éternel rival de Carlo Goldoni. Après avoir exploré les possibilités de La Princesse Turandot entre les murs du Cégep de Saint-Hyacinthe, en 2004, le directeur du Théâtre Tout à Trac propose, sur l’imposant plateau du Théâtre Denise-Pelletier, une toute nouvelle mouture de l’oeuvre.

TURANDOT OU LA MORT

Assez simple, l’intrigue est ainsi résumée dans le communiqué: "Terriblement belle, la princesse Turandot nourrit une haine féroce des hommes. Tout homme qui veut l’épouser doit répondre à trois énigmes sous peine de se faire trancher la tête. Quatre-vingt-dix-neuf prétendants ont déjà échoué. L’empereur se plaint amèrement de ce que sa fille a décimé la terre de ses princes et multiplié ses ennemis. Voilà qu’arrive un autre prince et qu’il demande à subir l’épreuve. Saura-t-il terrasser l’orgueil de la plus belle femme du royaume? La princesse cédera-t-elle enfin à l’amour?"

Après avoir lu les différentes traductions de la pièce, les contes persans qui l’ont inspirée et le livret du fameux opéra de Giacomo Puccini, le metteur en scène a repéré, dans ce foisonnement d’avenues, la direction à prendre, l’angle que devait adopter sa réécriture. "Ça m’énervait que l’histoire se déroule en Asie et que Gozzi y place des Italiens. C’est là que j’ai imaginé que le prince soit vénitien. De là naît une rencontre entre deux familles, les Italiens et les Asiatiques, et par le fait même entre l’Orient et l’Occident. D’ailleurs, plusieurs études révèlent que les deux peuples se sont influencés, qu’il y eut de nombreux échanges entre eux." Après avoir entrepris d’asseoir son spectacle sur cette riche dualité, Hugo Bélanger a constaté que bien d’autres dichotomies opéraient. En filigrane, il est question des hommes et des femmes, de l’Est et de l’Ouest, de la tragédie et de la comédie, du soleil et de la lune… En fait, la représentation illustre magnifiquement le choc des cultures et des traditions. "Je ne dis pas que la pièce parle explicitement de toutes ces questions, mais tout ça est là, quand même, et c’est ce que je trouve intéressant."

Évidemment, la plus grande collision à laquelle le spectacle donne lieu est celle des traditions théâtrales. "Les Italiens arrivent avec la commedia dell’arte et les Asiatiques avec un mélange de plusieurs disciplines: nô, bunraku, kabuki, etc. Comme nous avions défini notre commedia dell’arte rêvée en travaillant sur L’Oiseau vert, nous avons cette fois déterminé notre Orient rêvé. En fait, on s’est inventé des codes et on les a respectés comme s’il s’agissait d’une véritable tradition." Il y a donc un continuel aller-retour entre le sérieux et le grotesque, une juxtaposition qui exige du doigté. "Pour arriver à faire cohabiter les deux, il faut donner autant de force à la tragédie, l’espace sacré, qu’au comique, l’espace païen."

Pour relever ce considérable défi, le metteur en scène bénéficie d’une troupe exceptionnelle: Maude Desrosiers, Martin Vachon, Marie-Ève Milot, Catherine Ruel, Marie-Ève Godin, Kim Gourdeau, Julie Roussel, Marie-Claude Giroux, Éloi Cousineau, Carl Poliquin, Claude Tremblay et Marie-Claude St-Laurent. On a déjà hâte de les voir se mettre en quatre pour nous faire rire et nous émouvoir.

Du 17 mars au 1er avril
Au Théâtre Denise-Pelletier
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