L’Histoire lamentable de Titus : Crimes et châtiments
L’Histoire lamentable de Titus, une tragédie de Shakespeare dont Jean Asselin et ses collaborateurs font un véritable fatras.
Avec L’Histoire lamentable de Titus, une pièce romaine presque jamais montée au Québec, Jean Asselin, directeur artistique de la compagnie Omnibus, se mesure à un treizième Shakespeare en carrière. Pour une "maîtrise d’oeuvre", le moins que l’on puisse dire, c’est que le résultat n’est pas le moins du monde maîtrisé.
La tragédie en cinq actes (la représentation totalise trois heures) se tient dans un palais désespérément gris. Conçu par Charlotte Rouleau et éclairé par Mathieu Marcil, le décor est pour le moins surchargé: escalier, balcon, trappe, tourelle et vomitoire alourdissent souvent le déroulement des scènes. François Barbeau et Jaber Lutfi ont signé des costumes et des accessoires aussi inesthétiques que disparates, des objets bigarrés et factices qui pastichent l’Orient avec autant d’impudeur que l’Occident. Pour ne rien arranger, la trame sonore d’Éric Forget nous assène des bruitages aussi pénibles que redondants. Dans le rôle-titre, Denis Mercier est nettement plus à l’aise dans les deux derniers actes, là où le général feint d’avoir perdu l’esprit. Tandis que Sophie Faucher (Tamora), Jean Boilard (Saturninus) et Didier Lucien (Aaron) s’en tirent honorablement, les huit autres comédiens de la distribution livrent des interprétations pâles ou alors carrément affligeantes.
Le spectacle est à ce point brouillon et cultive avec une telle maladresse l’esthétique du bric-à-brac qu’il évoque parfois l’amateurisme. Aussi invraisemblable qu’interminable, cette histoire de vengeance offre tant d’hémoglobine et de membres tranchés que la barbarie y cède fort malencontreusement la place au guignol. Dans la notice consacrée à Titus Andronicus dans les OEuvres complètes de Shakespeare publiées dans la Bibliothèque de la Pléiade, Yves Peyré écrit: "Les déferlements de cruauté et de barbarie qui, en divers points du globe, ont régulièrement marqué la fin du XXe siècle et les débuts du XXIe n’ont cessé de faire de cette tragédie de l’horreur un écho puissant de la modernité." Est-il nécessaire de préciser que la relecture orchestrée par Jean Asselin est bien loin de rendre cette actualité explicite?
Jusqu’au 25 mars
À Espace Libre
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