Axël : Beauté sombre
Scène

Axël : Beauté sombre

Avec Axël, production du Théâtre Péril, on entre dans un monde mystérieux où éclatent la pureté de la langue, la force du rêve et de l’imaginaire.

Pièce symboliste de Villiers de l’Isle-Adam, Axël raconte une quête d’absolu. Celle de Sara, orpheline élevée dans un couvent qui, au moment de prononcer ses voeux, se rebelle et s’enfuit; celle d’Axël, jeune homme vivant isolé dans un château au fond d’une forêt. Après avoir vécu, pendant des années, calme, "assujettissant ses désirs par le détachement", comme le lui a enseigné son maître, Axël voit se réveiller en lui passions et appétits: richesse, amour, puissance, il veut tout goûter. C’est alors que se produit la rencontre de ces deux êtres entiers dont l’amour fulgurant culmine dans la mort, image suprême d’une quête préférant à la vie l’intensité du rêve et de l’idéal.

Christian Lapointe fait preuve d’audace en montant ce texte réputé injouable qu’il a coupé, aménagé, pour rendre possible sa présentation à la scène. Il en résulte un spectacle qui, avec son texte très littéraire et dense – magnifique -, et son esthétique du dépouillement, peut surprendre. Axël nous plonge dans un univers symboliste d’une grande cohérence, très loin de tout réalisme, le spectacle tenant davantage, le précise le metteur en scène dans le programme, de l’évocation que de la représentation.

Pour décor, des panneaux faits de voiles un peu translucides; y sont projetées, ainsi que sur les comédiens, des images en noir et blanc (Lionel Arnould), se mouvant lentement au cours des scènes; les costumes (Valérie Gagnon-Hamel), superbes, mélangent styles et tissus. On se retrouve ainsi dans un espace suspendu, dirait-on, comme hors du monde et du temps. Le jeu, un peu immatériel, plutôt statique, aux gestes esquissés, suggère plus qu’il ne montre, bien loin, encore une fois, de tout réalisme psychologique. Toute la place revient à la parole et au texte ciselé, riche, imagé, que les comédiens Paul-Patrick Charbonneau, Marie-Hélène Gendreau, Denis Lavalou, Éric Robidoux et Richard Thériault rendent, sauf en quelques rares occasions, avec grande netteté.

Spectacle intriguant, au puissant pouvoir d’évocation, Axël devient une cérémonie hypnotisante, un envoûtement, pour peu qu’on consente à l’effort de patience, d’ouverture que demande ce monde singulier d’images splendides et de sévère beauté.

Jusqu’au 8 avril
Au Théâtre Périscope
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