La Robe de mariée de Gisèle Schmidt : La vie est un songe
Avec La Robe de mariée de Gisèle Schmidt, Julie Vincent nous entraîne dans un univers aussi intrigant et fragmentaire que le rêve.
Dix-huit ans après Noir de monde, Julie Vincent, directrice artistique du Théâtre Singulier Pluriel, ose de nouveau exhiber ses mots et ses créatures fictionnelles sur la place publique. Pour se dévoiler de la sorte, elle use pleinement du stratagème que lui offre la scène. Cumulant ici les fonctions d’auteure, de metteure en scène et d’interprète, elle se projette, comme femme et comme artiste, dans les fantasmes de Gisèle Schmidt, une de ces comédiennes qui lui ont ouvert la voie et avec qui elle a noué, quelques années avant sa mort, une puissante amitié. Coproduit par le Théâtre PàP, La Robe de mariée de Gisèle Schmidt nous invite dans les rêveries amoureuses de deux femmes aussi absolues à la scène qu’en amour.
Soulignant le caractère éminemment théâtral et onirique de l’aventure, Geneviève Lizotte a ingénieusement introduit dans son décor le tronçon d’une scène de théâtre, avec coulisses. Sur les murs: une tapisserie vieillotte que les éclairages de François Roupinian rendent parfois opaque comme le réel, parfois translucide comme le rêve. Bien calée dans son fauteuil fleuri, bercée par les mélodies de Michel Smith, Gisèle accueille ses étranges visiteurs, les 11 personnages des six nouvelles-théâtre que le spectacle juxtapose. Multipliant les destins, les lieux et les époques (du début des années 70 à aujourd’hui), les courtes pièces sont autant de rêves sensuels, autant de stations où Gisèle et Julie réinventent le grand amour, redisent son impossibilité.
Malheureusement, le périple est inégal et ces histoires, au demeurant fort bien défendues par Éric Cabana, Jacinthe Laguë, Paul Savoie et Julie Vincent elle-même, restent prisonnières de leur condition fragmentaire. On attend en vain que les récits s’entrelacent, se répondent, se transcendent. À lier l’ensemble, la robe blanche ne suffit pas. Lorsqu’on commence à s’attacher à un couple, il s’évanouit sous nos yeux. Pourtant, il y a là de belles rencontres. À la rebelle Simone et au tourmenté capitaine, les personnages du troisième rêve, on espère ardemment que Julie Vincent consacrera toute une pièce.
Jusqu’au 15 avril
Au Théâtre Espace GO
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