Yves Amyot : Le libre penseur
Pour Yves Amyot, le bonheur du théâtre commence avec le plaisir du travail d’équipe. Le plaisir? Diderot, qu’il incarne dans Le Libertin, d’Eric-Emmanuel Schmitt, ne le contredirait sûrement pas.
L’auteur et philosophe Denis Diderot a consacré plus de 20 ans à l’Encyclopédie, entreprise colossale se donnant pour mission de faire la somme de toutes les connaissances de l’époque. Résultat: 28 volumes de textes et de planches préparés par de nombreux collaborateurs, dont plusieurs grands esprits du XVIIIe siècle. Parmi eux, Rousseau, Voltaire, Montesquieu.
Pièce à l’humeur joyeuse créée en 1997, Le Libertin présente un Diderot tout ce qu’il y a de plus humain. Retiré à la campagne chez son ami d’Holbach pour goûter un peu de repos, le philosophe y est rattrapé par le travail: on lui annonce qu’il doit, de toute urgence, rédiger l’article "morale" pour l’Encyclopédie. La nouvelle tombe mal, l’interrompant en pleine séance de pose – et de séduction – avec Madame Therbouche, femme à l’esprit libre et au charme fou venue faire son portrait. Pris entre travail et volupté, Diderot sera sans cesse dérangé par les autres femmes de la maison et leurs pressantes requêtes. Ainsi verra-t-il ses principes sur le mariage, l’amour, la fidélité mis à l’épreuve, ce qui remet en question, chaque fois, ses idées sur la morale… et le texte qu’il doit écrire.
Diderot apparaît, dans cette pièce, comme un libre penseur; toujours en quête de vérité, il doute, s’interroge. "Même si ses idées changent au fil de ses rencontres avec les différents personnages, Diderot est toujours fidèle à lui-même, explique Yves Amyot. Ce n’est pas de l’hypocrisie: il est chaque fois très sincère, mais il adapte sa pensée selon les situations. Pour lui, la pensée doit être aérienne. En plus, tout en étant raisonné, il est très charnel. Il est mené par le plaisir mais en même temps, c’est un philosophe, qui cherche. Et chacune des scènes l’amène ailleurs dans sa réflexion."
Eric-Emmanuel Schmitt a fait du Libertin une pièce "ludique, effervescente. C’est très vivant, à l’image de la pensée de Diderot. Même si Schmitt a fait sa thèse de doctorat sur Diderot, ce n’est jamais didactique; on y trouve des réflexions philosophiques, mais tout ça est merveilleusement bien intégré, avec beaucoup de légèreté." Mise en scène par Lorraine Côté, la pièce est "d’abord et avant tout une comédie, intelligente et très drôle: c’est un petit bijou de simplicité, d’efficacité."
Diderot, personnage toujours en mouvement, s’est facilement laissé approcher par le comédien. "Un personnage comme Diderot, qui est tout le temps en train de réfléchir, de se questionner, j’ai pas besoin de chercher longtemps pour le comprendre. La recherche qu’il fait du côté philosophique, j’ai l’impression de la faire aussi, autrement, dans mon travail de comédien: pour incarner un personnage, il faut aussi chercher, creuser sa façon de penser. C’est comme ça qu’on arrive, à partir de la sienne, à lui donner une âme."
L’équipe est complétée, sur scène, par Marie-Josée Bastien, Érika Gagnon, Jonathan Gagnon, Valérie Laroche, Klervi Thienpont; en coulisses, par Monique Dion, Denis Denoncourt, Denis Guérette, Stéphane Caron, Élène Pearson et Jean Bélanger.
Du 18 avril au 13 mai
Au Grand Théâtre
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