Festival Accès Asie : Irréductibles Amérasiennes
Scène

Festival Accès Asie : Irréductibles Amérasiennes

Chanti Wadge et Geneviève La donnent le coup d’envoi du Festival Accès Asie avec deux pièces en résonnance avec leurs origines asiatiques.

Amérasienne. Le terme n’existe pas encore dans le dictionnaire, mais il s’inscrit déjà dans le vocabulaire de Geneviève La. De mère québécoise et de père vietnamien, la jeune chorégraphe l’utilise pour signifier son désir d’unifier sa double identité. Des racines et des ailes, la pièce qu’elle présente cette semaine à Tangente, illustre cette recherche d’unité et la volonté d’être aussi libre que riche de son héritage culturel. "J’ai l’impression que c’est le premier tableau d’une pièce plus longue sur l’identité et le rapport aux origines, explique-t-elle. J’ai beaucoup de plaisir à la faire mais je la trouve difficile parce que le but est de faire la paix avec moi-même pour ne plus être en dualité. Ne plus être à moitié Québécoise et à moitié Vietnamienne mais être un individu à part entière."

Pour la première phase de sa quête identitaire, Geneviève La retourne au passé quelque peu douloureux de son enfance à Québec, où elle a longtemps vécu séparée de son père pour des raisons politiques et familiales. "Pour plusieurs tableaux, dit-elle, je me suis mise en contact avec le manque que je ressentais de ce père qui était absent non pas parce qu’il était mort ou méchant, mais parce que c’était son chemin de destinée. J’ai voulu explorer cette absence-là et retrouver comment, très jeune, j’ai créé intérieurement des ponts avec cette part de mes origines qui demeurait cachée et mystérieuse."

Pour Chanti Wadge, Coréenne adoptée par une famille de Vancouver, le lien avec l’Asie est encore plus énigmatique. "Mes origines sont plus d’ordre biologique et ancestral que culturel, reconnaît-elle, mais je me sens "connectée" d’une certaine façon à une sensibilité et à une esthétique asiatiques. Par exemple, je me suis sentie chez moi pour la première fois de ma vie à l’occasion d’un voyage en Inde." Pas étonnant que cette fabuleuse danseuse et jeune artiste multidisciplinaire se sente interpellée par les textes bouddhistes et qu’elle se soit inspirée du haïku, poème classique japonais de trois vers, pour créer [Thru]: The Stilllife series.

Réalisées avec la danseuse Zoe Poluch, 23 courtes performances placent le corps en relation poétique avec le son d’Alexander McSween, la lumière de Stéphane Ménigot et la scénographie de Louis-Philippe St-Arnaud. "J’ai utilisé tout ce qui a émergé en studio, commente la chorégraphe. Certains passages sont très visuels avec des images plutôt statiques qui reflètent plus les paysages intérieurs du corps. Ce sont des sortes de natures mortes qui contiennent la vie. Et puis il y a des moments où j’explore le mouvement en étudiant, par exemple la relation du corps au temps. En fait, j’avais choisi le haïku pour tirer l’essence de plusieurs choses et exploiter différentes esthétiques sans obligation d’avoir de fil conducteur. Mais finalement, il y en a un et la pièce entière est un long haïku."

Femmes de notre temps ballotées par les vents du multiculturalisme, Geneviève La et Chanti Wadge sont à l’image de la société québécoise, irréductiblement multiples et extraordinairement créatives.

Du 4 au 7 mai
Tangente
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