Boucar Diouf : Le grand rire black
Scène

Boucar Diouf : Le grand rire black

Boucar Diouf arrive à Québec avec son spectacle solo. Le Québécois d’origine sénégalaise, révélation de 2005 au Grand Rire de Québec, ramène du coup un humour dépaysant, frais comme un voyage aller-retour savane-banquise…

Le Québec de 2006 ne voit pas tous les jours un humoriste noir faire autant l’unanimité. Peut-être qu’on ne voit pas souvent d’humoriste noir tout court. Le spectre multiculturel, Boucar Diouf l’incarne en lui-même sur scène, et par défaut: l’humoriste a vécu 25 ans au Sénégal, puis 14 ans à… Rimouski. Sur scène, cela donne un tsunami de bons mots, à propos des moeurs québécoises jusqu’à nos étranges expressions, et des 40 °C de l’Afrique de l’Ouest jusqu’au froid hivernal du Bas-du-Fleuve.

Un Sénégalais, océanographe de formation, qui devient humoriste, ça laisse perplexe… "J’ai toujours cherché le bon côté des choses. En classe, lorsque j’enseignais, j’ai approfondi mon art en essayant de parler de biochimie avec humour. Puis, certains m’ont dit que je devrais me présenter aux auditions de Juste pour rire… et je l’ai fait. Mais après réflexion, c’était peut-être pour se débarrasser de moi…" Et il pouffe de rire, lui qui fait carrière depuis. Ses parents l’avaient poussé à l’époque à faire des études et ils étaient très fiers de ses accomplissements. Depuis, et à contre-courant, Diouf a peut-être fait le choix de sa vie: celui de faire carrière comme artiste.

Sur scène, Diouf livre un "humour propre", près du raconteur d’histoires. Un métissage de chansons, de proverbes, de contes et d’humour, qui nous rappelle que la scène humoristique au Québec est monopolisée pour une bonne part par le stand-up comique. À l’opposé, l’humoriste travaille un spectacle très inspiré des griots africains, ces artistes de père en fils qui mélangent eux-mêmes ces formes d’art sur fond de musiques rythmées. Et le charme du voyage dépayse, mais suscite l’enthousiasme.

Touchant, Diouf se fait un devoir de garder un aspect dramatique à son spectacle: "Émus, des gens se sont déjà mis à pleurer en plein spectacle. C’est arrivé par exemple lorsque je racontais les derniers moments que je passais avec mon grand-père avant de partir pour le Québec. Ce sont des thèmes universels, et c’est précisément dans ces moments qu’on se rend compte que nos différences ne tiennent pas à beaucoup de choses." Mais de manière générale, les Québécois aiment le verbe, selon les dires de Diouf. "Ils rient beaucoup, et apprécient profondément qu’on leur raconte des histoires. C’est probablement un aspect traditionnel, et c’est tant mieux…"

Cette jeune carrière n’a pas empêché l’humoriste de se pencher sur son rôle de représentation, dans une industrie essentiellement constituée de Blancs. "Tout se passe très bien jusqu’à maintenant. Cependant, tu dois continuellement faire attention pour ne pas te faire ghettoïser. Mais puisque les arts sont tous en train de se mondialiser, je ne vois pas pourquoi l’humour ferait exception. Moi-même, j’y suis attentif et je compte bien mondialiser mon style, en variant très souvent les types d’humour et en trouvant des façons de diversifier mes histoires."

Boucar Diouf sera à Québec pour un spectacle haut en couleur, lui qui déménagera bientôt dans la capitale, "pour se rapprocher de Montréal, mais pas trop. Surtout pour voir davantage ma blonde…"

Le 23 mai à 20h
Au Grand Théâtre
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