Ève Bonfanti et Yves Hunstad. : Acte de naissance
Scène

Ève Bonfanti et Yves Hunstad. : Acte de naissance

Ève Bonfanti et Yves Hunstad, auteurs de La Tragédie comique et de Du vent… des fantômes, déjà présentées au Carrefour, nous reviennent avec Au bord de l’eau. Fin d’une trilogie.

Après La Tragédie comique, dont le personnage cherchait l’acteur qui allait l’incarner, et Du vent… des fantômes, où les comédiens se demandaient ce qu’ils allaient dire au public, Ève Bonfanti et Yves Hunstad nous présentent, dans Au bord de l’eau, des dramaturges au travail. "Au départ, on a pensé écrire la pièce telle quelle, relate l’auteure et comédienne belge. Puis, on s’est rendu compte que, juste faire les personnages, ça n’allait pas nous plaire. Donc, on a décidé de se mettre en jeu, d’ajouter la femme et l’homme qui écrivaient la pièce, et on s’est donné le pari de faire une lecture-spectacle qui soit aussi passionnante qu’un vrai spectacle." C’est ainsi qu’en 2000, ils ont commencé à tester sur scène une proposition d’une vingtaine de minutes, qu’ils ont ensuite bonifiée au gré des commentaires des diverses assistances. "On écoute les réactions des spectateurs non seulement pendant la représentation, mais après, on boit un verre, on discute avec eux", explique-t-elle à propos de leur modus operandi, remarquant par ailleurs: "Ça a tout de suite flambé, car c’est extrêmement drôle. Les gens rient, rient, rient; leur imaginaire est en activité débordante parce que rien ne leur est imposé. On leur dit que c’est au bord de l’eau, mais c’est eux qui imaginent les roseaux, les costumes, les personnages… D’ailleurs, très vite, le public nous a dit: "J’espère que vous n’allez pas faire jouer ça par de vrais acteurs, avec un vrai décor; il faudrait que ça reste comme ça.""

Trois ans plus tard, ils arrivaient enfin avec le produit fini, "un spectacle qu’il est impossible de décrire, affirme-t-elle, parce que ce n’est pas une forme habituelle. Ce sont deux auteurs qui invitent le public à assister à la lecture d’une pièce en cours d’écriture. Il n’y a pas de décor, pas d’effets de lumière; on est assis derrière une table et on lit les personnages, on joue les auteurs. Les commentaires, les hésitations, les erreurs, les fous rires, les accidents, tout est écrit, mais tout a l’air improvisé. Donc, le public assiste en direct à la création d’une pièce." Pour ce faire, ils se sont bien sûr inspirés de leur propre expérience. "Tout ce que les auteurs disent, par rapport à la relation de l’humain à l’eau et au théâtre, les recherches qu’ils ont faites sur la science, tout est vrai, mais en fait, tout est devenu faux, parce qu’on est maintenant au stade de l’illusion." Une manière pour eux de mettre en évidence la nature trompeuse des apparences, le fait qu’il n’y a pas de vérité avec un grand V. "En plus, on fait semblant de se tromper, c’est-à-dire qu’on mélange les voix, ajoute-t-elle. Donc, rien n’est jamais stable, fixe, acquis. Et c’est une façon de dire que la vie bouge tout le temps, qu’on a beaucoup de personnages à l’intérieur de nous… Socialement et philosophiquement, ça met en cause les étiquettes, les choses qui catégorisent ou nous cloisonnent." Sans compter que, de ce fait,"les spectateurs sont tout le temps entraînés à jouer et à découvrir. Il n’y a pas de: "Venez nous voir, venez nous écouter", spécifie-t-elle. Il faut que le public soit un partenaire, qu’on joue ensemble à imaginer, à réfléchir, à méditer". Ça vous dit?

Les 25, 26 et 27 mai
Au Théâtre de la Bordée
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