Paul-André Fortier : Vice-versa
Scène

Paul-André Fortier : Vice-versa

Paul-André Fortier nous fait l’honneur d’inscrire Ottawa à son agenda d’exploration mondiale, avec son spectacle solo in situ Solo 30 x 30, présenté dans un non-lieu à l’occasion du Festival Danse Canada.

Après Newcastle en Angleterre et Nancy en France, le chorégraphe montréalais Paul-André Fortier entame la phase trois de son installation urbaine atypique dans la ville d’Ottawa, en première nord-américaine. Pendant 30 jours exactement, le virtuose de la danse contemporaine prend place sur un carré de béton soigneusement choisi à l’angle des rues Sussex et Rideau, pour livrer aux passants anonymes et visiteurs volontaires un solo tout en finesse.

Par une journée pluvieuse, les passants vaquent à leur train-train quotidien, ils errent, parapluies tordus à la main, et soudain, un homme, sur un plateau au beau milieu d’escaliers difformes, commence son ascension dans la danse contemporaine. D’abord avec des gestes précis, lents, puis prenant lentement une cadence émotive dans le mouvement qui emporte l’assistance à mille lieues de la ville grise et froide.

On donne à la prestation le nom de solo, mais Paul-André Fortier danse avec plusieurs éléments: les passants flâneurs, les promeneurs pressés dont les souliers claquent avec aplomb, la pluie qui crachouille, les parapluies noirs, rouges, jaunes – si théâtraux -, les oiseaux qui entament un cantique, les feuilles et débris qui effleurent le sol, le bête béton et cette grande porte brune qui trône derrière le danseur jouent des rôles de premier plan et composent la trame sonore de cette interprétation. Fortier fait corps avec ces matières, tellement que les cris et rires de jeunes punks et les remarques anodines lancées en écho sur l’asphalte n’altéreront en rien la transe commune de cette assemblée improvisée. Tous observent cet oiseau rare qui virevolte de toutes parts, certains pour un moment, d’autres pour une éternité.

Vêtu d’un imper transparent posé sur une veste vert lime, Fortier s’exprime et s’enracine, dans un rythme qui se fait ici saccadé, là fluide. À l’aube de la soixantaine, l’homme qui s’exécute devant nous fait obstacle au temps et à l’espace, créant autour de lui une onde distincte qui ne vacille à aucun moment.

C’est lorsqu’il fait finalement sa dernière ronde de saluts particuliers, bouclant ainsi la boucle, que l’on sent un relâchement dans la foule éparpillée. La cadence de sa respiration reprend à une vitesse normale. Et si chacun retourne à ses occupations journalières, le coeur plus léger, Fortier, lui, reprendra ce tour de danse de 30 minutes demain, même heure, beau temps, mauvais temps.

Après Ottawa, Fortier transporte son Solo 30 x 30 à Yamaguchi au Japon, du 19 juin au 18 juillet, pour finalement le présenter chez lui, à la Place des Arts de Montréal, du 20 octobre au 18 novembre. Notre collègue et chef de pupitre Arts et livres de Voir Montréal, Tristan Malavoy-Racine, revient tout juste de Nancy, où il a pu apprécier le travail de Fortier tout en alimentant un blogue. Pour connaître l’horaire complet du Festival Danse Canada, qui se déroule du 2 au 10 juin, visitez le www.canadadance.ca.

Jusqu’au 10 juin à 13h
À l’angle des rues Sussex et Rideau
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