Hôtel des deux mondes : En suspens
Hôtel des deux mondes, texte d’Eric-Emmanuel Schmitt produit par le Théâtre le Carré magique, invite à séjourner dans une bulle hors du temps, entre légèreté et gravité.
Difficile de résumer Hôtel des deux mondes sans en trahir le secret. Sachez toutefois qu’il nous emmène, par un tour un peu fantastique, dans un lieu mystérieux. Des personnages divers s’y rencontrent: une femme de ménage, un diseur de bonne aventure, un jeune rédacteur en chef, un président de compagnie imbu de lui-même, une jeune femme amoureuse de la vie. Intrigués en franchissant le seuil, ils y séjournent de façon temporaire; guidés par un personnage énigmatique, le Docteur S, ils sont amenés à réfléchir à leur vie, à l’amour, au bonheur, à la mort.
On retrouve avec cette pièce, présentée pour la première fois au Québec, l’art d’Eric-Emmanuel Schmitt, toujours aussi habile: texte plein de profondeur, humour fin, personnages bien dessinés. L’auteur s’y pose de nombreuses questions, entraînant le spectateur à sa suite. Le résultat en est une pièce pleine de sensibilité, qui intrigue et captive, même si l’écrivain n’y invente rien de nouveau, hormis la situation dans laquelle il plonge ses personnages. Le propos avive certaines réflexions qu’on se fait parfois, un peu mollement, quelles que soient nos convictions.
Dès l’entrée, la scénographie inclut le spectateur dans cet univers: public sur deux côtés avec, au centre, la réception de l’hôtel que suggèrent tapis et meubles. Sur les murs de la salle, des draperies créent un espace donnant une impression de flou tout à fait accordée avec le mystère de la pièce. Sur tout cela, éclairage assez fort, comme si tous, personnages et spectateurs, logeaient en même temps dans cet hôtel, ou pouvaient, à tout moment, s’y retrouver.
Sur cette scène un peu étroite, les comédiens vont et viennent, dans une mise en scène plutôt conventionnelle, centrée sur une direction d’acteurs fine et efficace (Vincent Champoux), toute au service du texte. Les comédiens (Anne-Sophie Archer, Laura Comeau, Marie-Claude Gignac, Jean-Nicolas Marquis, Marc Simard Nataren, Nicola-Frank Vachon) sont excellents, de plus en plus à l’aise au fil du spectacle, malgré quelques accrocs dans le texte et certains passages moins habiles, le soir de la Première.
Offrant un voyage étonnant, Hôtel des deux mondes émeut, fait rire, penser. Et, par sa délicatesse, rafraîchit.
Jusqu’au 17 juin
À Premier Acte
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