Frédéric Blanchette : L’Enfant
Frédéric Blanchette porte à la scène sa première "vraie" pièce de théâtre: Le Périmètre.
Le jeune auteur, metteur en scène et comédien Frédéric Blanchette procède ces jours-ci à la création de sa première "longue" pièce de théâtre: Le Périmètre. Mettant en vedette David Boutin, Catherine-Anne Toupin et Sylvain Bélanger, le spectacle examine la rupture d’un couple qui aspire à créer une zone de compromis et de conciliation autour de leur enfant, seul survivant de leur histoire.
Quand la pièce commence, le drame a déjà eu lieu. André et Catherine sont séparés depuis quelques mois. Forcés de se côtoyer, ils ont établi autour d’eux un périmètre de sécurité, un territoire intime qu’ils se sont promis de ne plus fouler. Mais, bien sûr, il n’en sera rien. Parce que, comme l’explique Frédéric Blanchette dans le dossier de presse: "On n’oublie pas, du jour au lendemain, les pensées les plus secrètes de l’autre. On n’arrête pas, comme par magie, d’avoir envie de l’autre, de croire en l’autre, de désirer l’autre, d’imaginer sa vie avec l’autre. On ne se dépossède pas d’un coup de toutes les armes qui ont le pouvoir de blesser l’autre."
C’est ce rapport, complexe et inspirant, qui incite le créateur à s’engager dans l’écriture d’une première "vraie" pièce: "C’est la situation dramatique qui me semblait particulièrement pertinente. Ce quelque chose de pas réglé. Ils doivent composer avec cette fausse distance. Ils connaissent tout de l’autre, ils savent où le toucher pour qu’il fonde, mais ils savent aussi qu’ils ne doivent pas utiliser ça. Ils ont fait un pacte. Un pacte qu’ils vont bien sûr rompre." Depuis leur séparation, André et Catherine sont aux antipodes, il semble que leurs différences ne cessent de s’intensifier. Elle est plus rationnelle qu’elle ne l’a jamais été, alors que lui se fie plus que jamais à son instinct. Ironiquement, c’est ce qui les a séduits au départ qui les rend aujourd’hui si incompatibles.
SCÈNES DE LA VIE CONJUGALE
Tout en avouant que la pièce trouve un ancrage dans son histoire personnelle – ce qui n’en fait pas pour autant une oeuvre autobiographique -, Frédéric Blanchette se défend bien de livrer une énième variation sur un thème déjà fort exploité, celui des déboires amoureux de sa génération: "La pièce peut évidemment soulever certaines questions sur le couple, sur les rapports entre les hommes et les femmes dans la trentaine, mais ce n’est pas du tout mon but. De toute façon, je n’aime pas les pièces à message. Ce n’est jamais le message qui m’incite à écrire, mais la situation. Comme spectateur, aussi bien que comme auteur ou metteur en scène, je veux me faire raconter une bonne histoire. Je considère qu’une histoire bien racontée, ça charrie l’humanité!"
L’écriture de Frédéric Blanchette est pour ainsi dire tissée de non-dits. Ces personnages se révèlent à mots couverts, en amorçant des phrases qu’ils ne termineront jamais: "J’ai été clairement influencé par les dramaturges américains. Après tout, j’ai appris à écrire des dialogues en traduisant des dialoguistes aussi brillants que Mamet ou Ives. Mon défi, c’est de créer une tension dans le dialogue, dans la manière dont les gens se parlent, aussi bien que dans ce que la pièce raconte." Pour arriver à ses fins, l’auteur mise beaucoup sur l’imagination du spectateur: "Les plus beaux antécédents d’un personnage, c’est ceux que le spectateur va déceler dans un silence, dans une retenue. La vraie pièce est en dessous des mots. Dans Le Périmètre, il y a des espaces vides, des blancs qu’il faut remplir. Pour moi, c’est l’essence même du théâtre, ce qui le distingue très clairement du cinéma."
Du 10 octobre au 4 novembre
Au Théâtre d’Aujourd’hui
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CV
Frédéric Blanchette est auteur, comédien et metteur en scène. Il a notamment signé le texte et la mise en scène de Pour faire une histoire courte…, une juxtaposition de courtes pièces abordant de manière complètement loufoque l’inépuisable thème de l’identité. Il a dirigé Cheech ou Les hommes de Chrysler sont en ville (Théâtre de la Manufacture, 2003) et Gestion de la ressource humaine (Le Mautadit Théâtre, 2004), deux textes de François Létourneau. Avec le Théâtre ni plus ni moins, il a monté (et le plus souvent traduit) les pièces de David Ives, David Mamet, John-Patrick Shanley, Harold Pinter et Catherine-Anne Toupin. Tout récemment, sur la scène de la Petite Licorne, il défendait avec conviction Trains fantômes, un monologue de Mansel Robinson.
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