Le Théâtre de la Manufacture : Quête et enquête
Scène

Le Théâtre de la Manufacture : Quête et enquête

Le Théâtre de la Manufacture s’apprête à décoiffer les spectateurs avec Les Points tournants, un road movie sur fond de quête identitaire écrit par l’auteur écossais Stephen Greenhorn.

Qui dit road trip, dit rencontres et péripéties rocambolesques. C’est ce qui attend Alex et Brian (Maxime Denommée et Steve Laplante), deux jeunes types un peu paumés qui, après avoir volé une planche de surf dans un magasin, décident de quitter leur ville natale d’Écosse pour aller vendre l’objet dérobé à Thurso, paradis terrestre des surfers du monde entier. Au volant d’une Lada (qui foulera elle aussi les planches!), les amis se dirigent vers le nord, empruntant une petite route de campagne et découvrant du même coup leur pays et ses habitants. Mais une menace les guette! Le propriétaire de la planche de surf, un petit mafieux tordu, mène sa propre enquête pour récupérer son bien…

QUÊTE SOUS-JACENTE

Parallèlement à cette enfilade de situations cocasses, une trame de fond plus substantielle semble se dessiner. "Le vol de planche est le point de départ pour amener le road movie et la quête d’identité. À travers l’inconnu et les rapports qui vont naître de l’ailleurs, Alex et Brian découvrent un peu plus qui ils sont", affirme le comédien et metteur en scène Philippe Lambert, qui a récemment monté les spectacles Beaver et Coin Saint-Laurent, à La Licorne. Tout au long de la pièce, cette quête identitaire n’est jamais nommée; elle demeure sous-jacente au récit. "C’est ce qui est habile dans l’écriture. Comme spectateur, on a simplement l’impression de suivre une histoire. Mais, tout à coup, on arrive à la fin et on s’aperçoit qu’on s’est fait avoir dans le bon sens du terme, c’est-à-dire qu’on s’est laissé prendre par le récit et que les personnages ont changé", soutient Philippe Lambert.

L’oeuvre de Stephen Greenhorn constitue un véritable petit voyage à travers l’Écosse. Chaque ville que visitent les deux protagonistes est nommée et chaque nouvelle rencontre contribue à brosser un portrait plus complet de la vie dans ce coin de pays. "L’idée, en quelque sorte, c’est de dire "connais ton pays et tu vas mieux te connaître toi-même". C’est très local et universel à la fois. Cette situation pourrait se passer n’importe où", mentionne le metteur en scène.

AU SERVICE DU TEXTE

Puisque la pièce est constituée d’une enfilade rapide de quelque 60 courtes scènes, le défi de Philippe Lambert était d’incorporer efficacement à sa mise en scène le dynamisme initial qui colore le texte. "L’écriture est très cinématographique et l’auteur est fort dans les ressorts dramatiques. Il y a pratiquement un punch à la fin de chaque scène. De plus, on voyage très rapidement d’un lieu à l’autre. L’idée était donc de rendre ça le plus vivant possible", souligne-t-il.

Selon lui, le rôle de la mise en scène est d’enrichir le texte, de servir – visuellement et humainement parlant – l’oeuvre qui s’anime devant les spectateurs. "La mise en scène ne doit pas être entre le public et le texte, mais bien au service du texte. Ce qui m’intéresse dans le fait de raconter une histoire, ce sont les rapports humains. Et l’humanité est très présente dans cette pièce", poursuit-il. Cette vision "humaniste" des choses l’a également guidé dans la façon de diriger les acteurs. "Il faut que le public se sente interpellé, que les comédiens touchent à une vérité simple. On travaille ensemble pour rendre plus crédible, attachant et humain un personnage", conclut Philippe Lambert.

C.V.

On doit ce texte à l’auteur Stephen Greenhorn, né en 1964 dans la région des Lothians de l’Ouest, en Écosse. Originairement baptisée Passing Place, la pièce a été écrite dans un contexte social et politique bien particulier. Le périple d’Alex et Brian se déroule dans les années 90, époque sombre pour l’Écosse qui subit – depuis plus de dix ans et malgré elle – les politiques brutales et douteuses des Conservateurs de madame Thatcher.
Cet univers de désillusion constitue le point de départ de Passing Place. Pour l’écriture de la pièce, Stephen Greenhorn s’est également inspiré de ses propres voyages et rencontres sur les chemins de l’Écosse. Voilà comment l’auteur en est venu à imaginer deux jeunes hommes qui n’ont aucune foi en l’avenir et qui fuient vers un ailleurs inconnu, sillonnant les routes d’une Écosse moderne en pleine redéfinition de son identité. Passing Place a été créée avec succès en 1997, à Édimbourg, au Traverse Theatre. Une première lecture publique de la pièce a eu lieu à Montréal il y a deux ans, après qu’Olivier Choinière eut traduit le texte original. L’oeuvre a également été traduite en allemand, en finlandais, en croate et en danois. Stephen Greenhorn poursuit actuellement une carrière florissante au théâtre et à la télévision.

Du 17 octobre au 25 novembre
Au Théâtre La Licorne
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