Bazooka : Bang! Dans le mille
Avec Bazooka, les Turcs gobeurs d’opium offrent une création solide et bien interprétée. Sans contredit leur meilleure production à ce jour.
Quand on entre dans le Théâtre Léonard-Saint-Laurent, on est accueilli par les sons filés du tuba de Jean-Philippe Dutil. Le décor ou plutôt l’absence de décor nous rappelle le film Dogville de Lars von Trier, avec ses lignes et pointillés dessinés en blanc sur le sol noir.
Imaginée par André Gélineau, l’intrigue de Bazooka nous plonge au fin fond du bois, non loin de Sainte-Johanne-des-Calvettes. Alors qu’un virus mortel menace le Québec, Paul (Alexandre Leclerc, naturel) invite ses amis à se réfugier dans le sous-sol de son chalet. Arrivent d’abord la libidineuse Jenny (excellente Marianne Roy), son chum Tak (Philippe Leclerc, tout en retenue), Aglaé (pétillante Marie-Pier Labrecque-Dubreuil), son frère Blutheau (comique Simon Vincent) et, enfin, Zarana (bouleversante Véronique Laroche), qui ne se pointe qu’au sixième jour de la quarantaine. Son arrivée troublera l’ordre qui peinait à s’établir.
Tous très crédibles, les comédiens au visage blanchi portent des costumes noir et blanc et s’expriment en joual. Marquée par plusieurs choeurs, la pièce est magnifiquement chorégraphiée par les metteurs en scène Marie-Claude Élias et André Gélineau.
Avec cette première incursion dans l’écriture dramatique, ce dernier signe un texte fluide, truffé de répliques mordantes et ponctué de moments forts. On pense ici à l’ostracisme dont Zarana est la victime, sa danse guerrière, le renversement de pouvoir, le monologue coloré de Paul, le choeur final… Malgré la thématique, la lourdeur n’envahit jamais ce spectacle rythmé, qui pourrait très bien tourner dans la province et trouver écho partout où il serait présenté.
En sortant de la première, vendredi dernier, il faisait noir et froid. En laissant tomber les premiers flocons de l’automne, Dame Nature semble avoir voulu célébrer à sa façon cette création d’un groupe de jeunes comédiens d’ici qui, même avec peu de moyens, a su engendrer une pièce magistrale.
Les 26, 27 et 28 octobre
Au Théâtre Léonard-Saint-Laurent
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