Glengarry Glen Ross : À toute vapeur
Scène

Glengarry Glen Ross : À toute vapeur

Glengarry Glen Ross, présentée à Premier Acte par le Dream Team, propose un tourbillon de paroles, de tension, d’humour caustique, dans un spectacle à l’énergie tonique.

Comédie grinçante, Glengarry Glen Ross étonne: rien n’y est blanc ou noir, tout se décline plutôt en mille nuances de gris. Dans cette pièce concise, David Mamet, d’une écriture nerveuse, modèle des personnages en état d’urgence. Quatre courtiers d’une société immobilière sont placés sous pression par leurs patrons: les deux meilleurs vendeurs du mois se mériteront une récompense; les autres seront tout simplement… congédiés. Inquiets, survoltés, entre obligation de réussir et nécessité de gagner sa vie, les employés sont prêts à tout pour prendre ou reprendre la tête du tableau des vendeurs ou pour gagner un peu d’argent, dans un monde où déjà, les magouilles sont courantes. Clients, collègues, patrons: plus d’amis, plus de solidarité, plus d’honnêteté quand vendre devient presque une question de survie.

La mise en scène de Frédéric Dubois, vive, nerveuse elle aussi, aiguise le tout, conférant à la pièce un rythme d’enfer. Au texte réaliste, Dubois superpose un travail d’horlogerie dans la direction d’acteurs, précise, nuancée, et une vision métaphorique de l’espace. Toute la première partie se joue dans des tractations verbales, alors que les personnages sont littéralement acculés au fameux tableau des vendeurs, alignés comme les suspects d’une affaire criminelle. Nous sont livrées alors, par l’attention portée aux expressions, aux intonations, leurs intentions, leurs hésitations les plus subtiles. Avec ingéniosité, le tableau dévoile, en deuxième partie, un bureau dont l’exiguïté et les diagonales accentuent l’impression d’étouffement déjà présente dans le texte.

Pour raconter cette course au profit, répliques hachées, tronquées, pensées qui se bousculent, exprimées à demi: la parole exacerbée traduit ici les moindres variations de la tension, de la pensée. Les comédiens, au jeu énergique, fébrile, incarnent avec grand talent et fermeté ces êtres, vendeurs ou client naïf, enfermés dans le presto de la concurrence et du rendement.

Aucune émotion dans ce portrait glacé de personnages affamés de profit. Le plaisir en est intellectuel, dans le regard acéré, cynique, que jette l’auteur sur un monde de calculs. Comme un train lancé à toute vitesse, Glengarry Glen Ross atteint son but avec une efficacité redoutable; la mise en scène de Frédéric Dubois et le travail de précision de son équipe, d’une unité exemplaire, en accentuent la course, et la réussite.

Jusqu’au 11 novembre
À Premier Acte
Voir calendrier Théâtre