La Chair des arbres : Des racines et des hommes
Scène

La Chair des arbres : Des racines et des hommes

La Chair des arbres: un hommage à la flore bien senti, mais difficile à décrypter.

L’idée première de Stéphane Séguin, comédien et metteur en scène du spectacle, est plus qu’intéressante: créer une pièce de théâtre via un collage de textes d’auteurs qui ont évoqué, selon leur sensibilité, les liens existant entre l’homme et la flore. Les discours d’une quinzaine d’écrivains et poètes québécois, en grande majorité issus du 20e siècle, s’entremêlent et se répondent. Accompagné sur scène de quelques éléments de la nature (de l’eau, de la terre, une branche d’arbre aussi gracieuse qu’un bois de cerf), Stéphane Séguin récite et interprète des extraits de textes qui, regroupés sous forme de sept tableaux – avec épilogue et prologue -, forment ensemble le récit d’une vie humaine.

DE L’ENFANCE À LA MORT

Chaque épisode constitue une étape de l’existence. On repère la notion d’enfance dans le deuxième tableau du spectacle, qui présente un extrait du roman L’Amélanchier de Jacques Ferron. On décèle également le concept de "l’arbre comme ami" dans les mots de Réjean Ducharme, celui de "la fleur comme amante", illustré par un texte d’Yves Thériault (qui représente la vie adulte et les chagrins d’amour qui y sont rattachés), et celui de la mort à travers la prose poétique d’Hubert Aquin. Mais malgré ces quelques points de repère, la mise en scène, que Stéphane Séguin a imaginée en collaboration avec Isabel Dos Santos, manque de cohésion. Le public est déstabilisé par toutes ces bribes de textes qui composent un parcours chaotique, en plus d’être noyé sous le poids des paroles qui coulent à flot. Le programme de la soirée, qui contient le nom des textes empruntés et le titre de chaque tableau, ne suffit pas pour saisir l’essence de la démarche artistique des créateurs.

JOUER LES MOTS

On découvre avec bonheur l’ancien français d’un Jacques Cartier qui s’émerveille devant les vertus thérapeutiques de l’arbre, les descriptions romanesques de fleurs et d’arbres tirées de La Flore laurentienne du Frère Marie-Victorin ou encore la poésie grisante de Saint-Denys Garneau, Émile Nelligan, Roland Giguère ou Paul-Marie Lapointe. Tout au long du spectacle, le comédien adopte un ton de voix qui allie peur et euphorie, doublé d’un regard ahuri qui se marie plus ou moins bien avec le sens des paroles mises en scène.

Certes, nous assistons à une performance d’acteur où langage et émotions sont ancrés dans le corps. Stéphane Séguin joue sur le double sens des mots avec passion et détermination. Mais ni son timbre de voix, ni son expression faciale troublante, ni ses mouvements (un mélange de danse, de mime, de gestes bon enfant) ne réussissent à nous émouvoir et à trouver leur signification réelle. Mentionnons les agréables jeux d’ombres et de lumières, façonnés par l’éclairage d’Eddie Rodgers. Un travail de recherche louable qui donne naissance à une oeuvre somme toute plus personnelle qu’accessible, bien qu’elle redonne vie à de grands auteurs trop souvent négligés.

À voir si vous aimez
Il y en avait des arbres par la fenêtre de Paul-Marie Lapointe
L’Amélanchier de Jacques Ferron
Le poème Roses et Ronces de Roland Giguère