Christian Bégin : Passer à l'acte
Scène

Christian Bégin : Passer à l’acte

Christian Bégin, auteur de Circus minimus, nous parle de cette pièce – sa première -, dans laquelle il interprète un clown à l’aube de son dernier tour de piste. Action!

Créée à Montréal en 2004, Circus minimus origine en fait d’un texte écrit par Christian Bégin pour le spectacle Vacarme cabaret perdu. "Ce sketch avait ravi Dominique Champagne au point où il m’a demandé: "Ça te tentes-tu d’écrire un show au complet avec ces deux personnages?" Et moi, j’ai fait: "Ah oui, tellement!" Parce que je sentais que c’était un bon véhicule pour exprimer ce que je voulais exprimer, relate l’auteur. En fait, cette pièce est partie d’une colère personnelle devant ma propre inertie. C’est-à-dire que, souvent, dans ma vie, je me suis gargarisé du fait que j’étais capable de réfléchir sur ce qui va mal dans le monde, mais que je me mets rarement en action, en danger. Je me suis dit: "J’ai un fils de 14 ans que j’ai projeté dans un monde qui m’inquiète de plus en plus. Je ne peux plus me contenter de chialer dans mon salon. Il faut que je joigne l’action à la parole, que ma façon de régir ma vie soit plus en accord avec les valeurs que je prône devant une bonne bouteille avec des amis." Alors, le moteur de l’écriture, ça a été, d’une part, d’exprimer la colère et l’indignation que je ressentais par rapport à ma propre inertie, mon propre cynisme, et c’était aussi, pour moi, une première façon de faire quelque chose, de mettre cette parole en action en l’incarnant dans des personnages, un objet théâtral qui convierait des gens à être témoins de ça, pour éventuellement susciter une réflexion, une action."

Ainsi a-t-il imaginé ce huis clos entre un clown et un homme canon (Martin Drainville). "C’est le soir de leur dernier spectacle et, donc, l’occasion pour eux de tracer un bilan des 13 ans de vie commune passés dans leur petite roulotte de marde à s’endurer l’un l’autre, raconte-t-il. Puis, un événement un peu spectaculaire va obliger le clown à faire face à lui-même." Cela, à l’intérieur de cette caravane, "qui est leur maison, leur univers et, métaphoriquement, l’état de notre monde". "On vit tous collés les uns sur les autres et, peu importe ce qu’on fait, où qu’on soit, ça a un effet sur le reste de la planète, fait-il remarquer. Mais c’est également l’intérieur du clown, c’est-à-dire son univers mental. Il est prisonnier à la fois de l’endroit physique et de lui-même; Dominique a joué sur ces deux plans. Aussi, par les éclairages, la musique et la bande sonore, il a beaucoup fait appel à l’extérieur de la roulotte, qu’on évoque toujours, mais qu’on ne voit jamais." De cette manière, le metteur en scène arrive à "éclater cet univers". "Car c’est un show à la fois hyperréaliste et surréaliste. Il faut le voir pour comprendre parce qu’il est difficile d’en parler sans dévoiler les punchs. C’est un voyage entre la vie qu’on a et celle qu’on aurait voulu avoir. Et c’est une pièce très dure, au langage extrêmement cru. Mais il s’agit vraiment d’un choix d’auteur pour exprimer l’incapacité qu’a le clown à dire, à nommer sa souffrance, ce qui l’indigne. Il n’a tellement pas de moyens, il est tellement désabusé, coupé de lui-même, que même sa langue n’arrive pas à traduire son état d’âme, son état d’être", observe-t-il. Bref, un mélange de tragédie et de comédie, sur fond d’humour caustique.

Du 30 novembre au 2 décembre
Au Théâtre de la Bordée
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