Under construction : Chantier permanent
Scène

Under construction : Chantier permanent

Avec Under construction, le Théâtre de l’Opsis met la table pour un Cycle états-unien des plus musclés.

Le Cycle états-unien de l’Opsis s’ouvre avec Under construction, une pièce de Charles L. Mee par essence incomplète, reflet d’un pays continuellement à la recherche de lui-même. En une trentaine de tableaux, l’auteur épouse le caractère éminemment rapiécé, on serait tenté de dire désuni, de sa terre natale. La structure de l’oeuvre, suite de très courtes scènes aux registres extrêmement contrastés, est à l’image de la nature composite de la nation. Le puritanisme, le militarisme, la disparité des richesses, la drogue et la criminalité y côtoient l’amour, la création et le soulèvement des masses. Patchwork, melting-pot et mosaïque sont des termes qui s’imposent. Venez vous contempler dans le miroir fracassé de l’Amérique!

Traduite par Pierre-Yves Lemieux, la pièce fait entendre une musique aussi aléatoire que celle de Cage, une langue aussi crue que celle de Bukowski ou Burroughs. De la génération beat à la génération punk, toutes les utopies y sont représentées. La représentation n’est pas sans évoquer, il faut bien l’admettre, l’avant-garde artistique des années 70, une période où les agissements du gouvernement étaient remis en cause. Voilà qui arrive à point: notre époque a cruellement besoin du discours critique des artistes. Loin de toute nostalgie, l’oeuvre est ouverte sur l’avenir, permet d’imaginer ce qui pourrait succéder aux abominations de l’ère Bush.

Assumant le caractère éminemment théâtral de la partition, Luce Pelletier n’a pas cherché à y mettre de l’ordre à tout prix. Sa mise en scène, loin de tout réalisme, s’appuie sur le jeu hautement physique des acteurs. En adoptant des postures précises, des démarches caractéristiques, des danses emblématiques, les corps cristallisent chacune des décennies visitées. À ce chapitre, Louise Cardinal, Daniel Parent et Caroline Lavigne s’avèrent particulièrement doués. Bien que le spectacle manque encore d’irrévérence – la matière première offre plus d’impudeur, autorise une plus forte commotion -, il est sur la bonne voie. Au fil des représentations, l’aventure risque fort de prendre du mordant.

Jusqu’au 16 décembre
À la Salle 2 du Théâtre Espace GO
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