Rétrospective Danse : Bon an mal an
Avec l’extraordinaire richesse de la programmation en danse, on imagine mal les difficultés vécues par le milieu qui réussit à toujours faire contre mauvaise fortune bon coeur.
Le plus gros succès de l’année en danse a sans doute été Le Match des étoiles. Les chorégraphes de l’émission remplissent les gymnases de téléspectateurs soudain saisis par le feu du mouvement, tandis que l’animateur Normand Brathwaite et l’ex-ballerine Geneviève Guérard sont devenus les icônes médiatiques de la danse pour tous. Et si l’École supérieure de ballet contemporain les a invités à animer sa soirée bénéfice, c’est que les professionnels de la danse cherchent à susciter l’intérêt du grand public autant que la générosité des donateurs et des organismes de subvention. Une autre danseuse étoile des Grands Ballets Canadiens de Montréal, Anick Bissonnette, en sait quelque chose. Reconduisant son mandat à la présidence du Regroupement québécois de la danse (RQD), elle a ouvert les Grands Chantiers de la danse, invitant les membres à la concertation et à la mobilisation pour trouver les moyens de structurer le milieu et d’en nourrir la vitalité.
Même si la directrice du RQD a qualifié le projet de quasi utopique et même si l’esprit de compétition règne dans ce secteur où il y a bien plus d’appelés que d’élus, force est de constater que la précarité n’en érode ni la créativité ni la solidarité. Des preuves? La diversité des démarches et des propositions, le soutien financier du RQD à la formation continue des artistes indépendants, la réponse massive à l’appel de Nathalie Buisson pour le spectacle au profit de la recherche sur le cancer, la mobilisation d’une centaine de bénévoles pour les quatre jours de célébration de la Journée internationale de la danse, la participation enthousiaste des artistes de la relève aux activités promotionnelles du collectif de La 2e Porte à Gauche, ou encore, le projet de recherche Clash, engagé par Tangente et Lynda Gaudreau – également conseillère artistique du FTA customisé, censé remplir le vide laissé par la disparition du FIND. Ajoutons les nombreuses réactions individuelles et collectives aux coupures budgétaires annoncées par le gouvernement Harper, particulièrement catastrophiques pour la danse: avec la suppression de subventions pour les tournées à l’étranger, source majeure de revenus pour les compagnies intermédiaires, c’est toute une génération de créateurs qui est menacée de faillite.
En contrepoids à cette triste nouvelle, Québec a annoncé le soutien à l’exportation de notre culture, faisant aussi la joie des Ateliers de danse moderne de Montréal, LADMMI, qui dispose enfin du financement nécessaire à la construction de locaux adaptés à ses besoins. Joli cadeau d’anniversaire pour cette école qui a fêté ses 25 ans à l’instar de la compagnie Danse-Cité et de Tangente, précieuses institutions pour les artistes émergents ou marginaux. 2006 était d’ailleurs une année anniversaire pour plusieurs autres compagnies, et les Grands viennent d’entamer leur 50e saison, célébrant l’évènement avec accompagnement orchestral pour tous les ballets, faste en contraste total avec les réalités du milieu.
Sur scène, l’année nous a offert son lot de déceptions et d’éblouissements, mais les regrets sont déjà dissipés. Ne reste que l’ouverture aux joies de la découverte qu’on anticipe pour 2007.