Nicolas Stemann : OEuvre de jeunesse
Scène

Nicolas Stemann : OEuvre de jeunesse

Avec Werther!, Nicolas Stemann se sert du chef-d’oeuvre de Goethe comme d’une caisse où faire résonner les violences de notre époque. Iconoclaste.

En 1774, la publication des Souffrances du jeune Werther suscite de très vives réactions. Le premier roman de Goethe, alors âgé de 24 ans, est rapidement lu de par le monde. Condamnée par les uns et portée aux nues par les autres, l’oeuvre de jeunesse devient un livre-culte, l’emblème de toute une génération. Prose enfiévrée, douloureux triangle amoureux, émotions exacerbées… la plaquette a tout ce qu’il faut pour déclencher les passions. On ira même jusqu’à lui attribuer une augmentation du taux de suicide. Roman-clé du mouvement Sturm und Drang, Werther annonce l’immense vague romantique qui va déferler sur l’Europe du 19e siècle.

Pour le metteur en scène allemand Nicolas Stemann, il n’existe pas de personnage plus approprié que Werther, l’ego le plus démesuré de la littérature allemande, pour aborder les blessures de la jeunesse d’aujourd’hui. Selon lui, les déboires du jeune héros romantique n’ont pas pris une ride. Porté à bout de bras par l’Autrichien Philipp Hochmair, un comédien que l’on dit d’exception, le solo imaginé par Stemann, quelque part entre la performance, le théâtre et la lecture, se fore un parcours pas du tout conventionnel dans les pages du classique. Présenté en allemand, avec surtitres français, le spectacle interroge la maladie d’amour de Werther, celle qui le ronge et qui le mène tout droit à la mort. Pour arriver à ses fins, la représentation semble emprunter tous les registres, du tragique à la clownerie, en passant par le country.

À l’ère de la vidéo et de l’ecstasy, le roman de Goethe serait plus pertinent, virulent et nécessaire qu’il ne l’a jamais été. Notre Werther moderne ne se sépare jamais de son microphone et de sa caméra. Pouvait-il en être autrement? Derrière lui, son visage, retransmis en direct sur grand écran: les confessions épistolaires sont devenues journal vidéo. Plus que jamais, le jeune homme est l’archétype du poète, un créateur qui fait de sa vie une matière première. Lorsque la rectitude d’Albert, son rival, surgit dans la vie de Werther, le cours des choses paraît s’enrayer, fatalement. Depuis sa création, en 1997, le spectacle a été présenté plus de 500 fois. Réjouissons-nous, il est enfin de passage à Montréal.

Du 19 au 24 février
À l’Usine C
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