Macbett : Délire absolu
Scène

Macbett : Délire absolu

Absolu Théâtre présente un Macbett où l’absurde règne en souverain.

Dans sa version de Macbett, Ionesco a gardé la trame principale du texte original de Shakespeare, tout en y ajoutant des passages et des personnages dont le caractère absurde tranche avec le fond tragique de l’oeuvre. Ainsi, les barons Glamiss et Candor décident un jour de se révolter contre "le tyrannique" Duncan, roi d’Écosse. Une sanglante bataille s’ensuit, au cours de laquelle les fidèles généraux Banco et Macbett doivent défendre leur chef Duncan. Puis, après avoir été envoûté par deux sorcières qui lui prédisent l’accès au trône, Macbett assassine ses rivaux pour hériter de la couronne. Mais il n’a pas prévu le retour de Macol, fils biologique de Banco, animé d’idéaux encore plus vils que les siens…

AMBIANCE CONVIVIALE

La jeune compagnie née en 1998 ne se gêne pas pour teinter le spectacle de sa délirante couleur. Par exemple? En plus de participer activement au déroulement de l’action, le public a droit à quelques dialogues chantés, au strip-tease d’une sorcière ou à un spectacle de marionnettes! Il n’est pas rare qu’une musique de fête foraine accompagne le bruit des mitraillettes qui résonnent sur le champ de bataille.

Le metteur en scène Renaud Paradis a clairement donné la consigne aux comédiens de tourner toute scène ou manifestation tragique en complète dérision. Résultat? Les personnages se prennent tellement au sérieux (et c’est voulu) que le public et les interprètes deviennent complices dans l’exagération. Marie-Ève Bertrand enchaîne avec brio les rôles de Lady Duncan, de Lady Macbett et d’une sorcière. Dans la peau de Banco, François-Xavier Dufour montre sa capacité à changer rapido presto de registre, passant du tragique à l’absurde avec une habileté qui l’honore. Et on se régale du jeu de Stéfan Perreault, qui campe un Duncan mou et trouillard. L’ensemble est bien rythmé et les comédiens rentabilisent au maximum les quatre chaises et trois tables qui forment le décor. Dans une salle privée de coulisses, il est amusant de voir les costumes et accessoires en plastique virevolter dans tous les sens.

UN ENGAGEMENT FLOU

Absolu Théâtre voulait produire un spectacle engagé et établir un parallèle entre la soif de pouvoir de Duncan et Macbett et celle des États-Unis. Voilà un pari moins bien gagné. Il y a bien sûr quelques propos dénonciateurs et quelques passages "modernisés", où Duncan s’apparente à un politicien véreux, mais ils sont mal intégrés à la pièce et nuisent à la fluidité du récit.

On reste également perplexe lorsqu’on nous "plaque" soudainement au visage les portraits de Bush ou d’Hitler (image forte s’il en est). Certes, il y a un lien à établir entre Macbett et tous les despotes de ce monde, mais le parallèle manque ici de profondeur. À cela s’ajoute une façon plus ou moins habile de planter l’action dans les années 2000, en évoquant notamment l’émission radio-canadienne Des kiwis et des hommes (où Olivier Morin interprète Francis Reddy…). On saisit mal la pertinence de la blague.

Jusqu’au 17 mars
À la Salle intime du Prospero
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Le livre Confessions of an Economic Hit Man de John Perkins
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