Anne Millaire : Mise à jour
Scène

Anne Millaire : Mise à jour

Rencontre avec Anne Millaire, qui signe avec le comédien Ariel Ifergan Z comme Zadig, une adaptation théâtrale du célèbre conte de Voltaire, dont elle assure également la mise en scène.

La philosophie, l’humour et le pouvoir ont toujours été au centre de l’oeuvre de Voltaire. Écrit en 1747, Zadig n’écarte pas ces thèmes, en plus de jeter un éclairage intéressant sur les droits de l’homme, l’égalité, la tolérance.

Z comme Zadig est un voyage initiatique marqué par trois étapes importantes dans la vie du personnage, jeune Babylonien connaissant une ascension fulgurante dans les sphères du pouvoir et ayant la mauvaise et opportuniste idée de tomber en amour avec une femme qu’on pourrait, au bas mot, qualifier d’influente et d’engagée (dans tous les sens du terme). La comédienne et auteure Anne Millaire, qui a joué aux côtés de Robert Gravel et de Jean-Pierre Ronfard au NTE, assure ici la mise en scène. Appuyé par Jeannot Bournival (un multi-instrumentiste qui joue surtout de la clarinette basse), un seul acteur, Ariel Ifergan, incarne tous les personnages (plus d’une douzaine): "C’est Ariel qui a fait la proposition", nous dit Anne, qui fait beaucoup de mises en scène scolaires avec plus de 20 ou 30 élèves sur les planches. "Pour moi, c’est un exercice fantastique que de fonctionner avec un seul comédien. En fait, l’idée est de faire du musicien un commentateur, quelqu’un d’aujourd’hui qui ne comprend pas à quoi fait référence tout ce qui est raconté."

Si la relation entre les deux personnages peut s’apparenter à celle entre Sancho et Don Quichotte, l’adaptation, qui reflète bien l’apprentissage, semble très en prise sur l’actualité. "Au départ, toute tentative d’adaptation (surtout en ce qui concerne Voltaire) est toujours un peu nébuleuse et abstraite. Mais finalement, nous avons tellement réduit et concentré [ils sont passés d’un récit de quatre heures trente à un spectacle d’une heure trente] que pour moi, tout le propos est devenu assez clair. Alors le musicien est plutôt là pour faire des commentaires sur le personnage qui se trouve trop bon ou qui ne se rend pas compte de ses erreurs. Les commentaires, surtout musicaux, allègent beaucoup le propos."

PRENDRE ET LAISSER

Tout en ayant conservé les formules mémorables de l’auteur, les collaborateurs ont écarté l’aspect moraliste du texte. "Nous faisons du théâtre: nous ne voulons pas du tout être didactiques."

Dans le travail d’adaptation (largement inspiré d’improvisations), aucun passage ni aucune folie n’ont été exclus d’office. Ils ont "testé" et analysé toutes les possibilités avant d’emprunter une direction et de sacrifier certains personnages savoureux. Au bout du compte, la pièce, qui ressemble à une quête initiatique sertie d’humour, portera essentiellement sur la tolérance: "Sous plusieurs aspects, c’est très actuel. Le rapprochement avec les accommodements raisonnables, entre autres, est inévitable. Aussi, comme un ange entre en scène à la fin du conte, ça porte à la réflexion concernant la Providence et la responsabilité."

Étant donné que Voltaire était agnostique, le questionnement pousse aussi du côté des principes d’égalité chers à l’auteur. Avec cet objet théâtral naviguant dans toutes les eaux littéraires, l’acteur se retrouve à assurer à la fois le travail d’un conteur et celui d’un interprète incarnant complètement certains personnages: "On a beaucoup travaillé la psychologie des personnages, et certains ont maintenant une saveur contemporaine."

Voltaire a signé 56 pièces, mais ils ont choisi d’adapter Zadig: "Il y a des ouvertures et des récits dans les textes qui ne sont pas pour la scène, et pour le transfert, sur le plan du vocabulaire et de la structure, c’est beaucoup plus simple à dire et à faire qu’avec la structure de son théâtre, qui est complexe, souvent lourde, et pas toujours bonne!" dit-elle en riant. Or ses contes, tel Zadig, sont très théâtraux et regorgent d’action…

Du 13 au 31 mars
Au Théâtre Denise-Pelletier
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