Hugo Lamarre : Monstre de beauté
Scène

Hugo Lamarre : Monstre de beauté

Hugo Lamarre se sert de la lumière pour jeter un éclairage nouveau sur l’histoire de L’Homme éléphant. Entre le clair et l’obscur, les apparences et la vérité.

Qui ne connaît pas l’homme éléphant, que ce soit par le truchement du film de Lynch, de ouï-dire, de lectures ou encore de la pièce de Bernard Pomerance? Dans ce cas, il est question de la fin de sa vie, alors que, découvert par un docteur, il connaît la célébrité. "C’est l’épisode le plus heureux, celui où il réussit à interagir avec les gens et passe de créature à homme", précise le metteur en scène Hugo Lamarre. Un renversement de perception, qui met d’ailleurs en relief ce qui le fascine dans cette histoire, soit cette dichotomie entre le caractère et l’apparence du personnage. "John Merrick était magnifique; d’une générosité, d’une bonne humeur, d’une joie de vivre désarmantes, commence-t-il. En même temps, tu ne peux pas imaginer une déformation physique pire que ça; il était littéralement un monstre. C’est donc cette opposition qui m’a frappé et j’ai pensé que c’était une belle métaphore pour la société en général. Dans le sens où il existe une distance entre ce qu’on a à l’intérieur, ce que les autres voient de nous et ce qu’on décide de projeter." Quant à ce qui a trait au texte, il remarque: "L’auteur ressort des choses que l’homme éléphant, le docteur ou d’autres personnages témoins ont réellement dites. Aussi, Merrick adorait lire, alors sa pensée était structurée comme de grands romans d’amour, de cape et d’épée… Ce qui fait qu’il y a un côté véridique, mais aussi, une belle poésie dans ce langage." Cela dit, il est à noter que leur interprétation privilégie le point de vue du héros plutôt que celui du docteur.

Par ailleurs, s’étant donné pour mission de revisiter tour à tour les différents matériaux de l’art théâtral (décors, son, jeu, etc.), la troupe des Insomniaques s’intéresse ici à l’éclairage. "Pour moi, le propos de la pièce, c’était la distance qui existe entre ce qu’on a à l’intérieur et ce que les gens voient de nous. Donc, la lumière me semblait être la matière qui me permettrait d’explorer ça le plus possible, relate-t-il. Par exemple, à chaque apparition d’un nouveau personnage, elle vient montrer soit ce qu’il a à l’intérieur, soit ce qu’il décide de laisser paraître. À cela s’ajoute un ajustement léger au jeu qui, une fois que le personnage est présenté, disparaît. Tout ça pour amener une nouvelle compréhension, pour jeter un nouveau regard sur le propos." Ainsi crée-t-il des images en jouant du clair et de l’obscur; un éclairage qui fait également office de décor. "On utilise des projections vidéo, du tulle, de la lumière conventionnelle mais mieux découpée… On peint, en quelque sorte, avec la lumière, illustre-t-il. Après ça, le costume devient très important parce que c’est la seule chose qu’on éclaire, le seul élément concret avec le corps de l’acteur." Enfin, l’impression qu’ils ont voulu susciter est celle d’"une brise un après-midi d’été dans un champ, résume-t-il. Parce que c’était ça, Merrick. Il était d’une douceur et d’une gentillesse qui faisaient que, quand tu le rencontrais, tu sortais de sa chambre heureux et détendu." Exactement le genre d’expérience qu’ils souhaitent nous faire vivre.

Jusqu’au 14 avril
À Premier Acte
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