L’Intranquillité : Langage corporel
L’Intranquillité de Fernando Pessoa, mise en scène par Marc Béland, se retrouve dans la bouche et le corps de 12 comédiens.
Dissimulé sous au moins 43 pseudonymes, le poète portugais Fernando Pessoa (1888-1935) n’a cessé de soumettre ses émotions à l’oeil intransigeant de la lucidité. Dans la chorégraphie complexe des mots, il explorait l’être, sa personne, comme on entre dans une vaste demeure aux multiples portes. Ce qu’il cherchait? Le moi, camouflé par la conscience. La vérité, debout, au milieu des feintes et des masques.
La matière Pessoa, qui aspire à la transparence, ne se reçoit pas aisément du premier coup. Aussi, l’adaptation théâtrale de l’oeuvre littéraire Le Livre de l’intranquillité que propose la jeune compagnie Sankéo Théâtre, malgré un bon travail de sélection de textes, nous laisse parfois errer dans nos pensées, à tenter d’assimiler un parcours poétique et intellectuel si dense qu’il retrace, en quelque sorte, le questionnement d’une vie entière.
Un des meilleurs aspects du spectacle réside dans l’effet et le mouvement que semble provoquer le texte sur les 12 acteurs sur scène. "Vivre, c’est être en mouvement", a dit le poète, et les acteurs parviennent ici à la parole au milieu des gestes. Comme si le dire devait passer d’abord par l’expérience du corps. S’ensuit donc une série de chorégraphies qui, sans les appuyer, permet aux mots de prendre leur place sur la scène qui devient un véritable territoire de l’étrangeté. On dirait un laboratoire où l’on mesure la parole jusqu’en ses gestes.
On se croirait dans l’atelier du poète, dans une zone d’urgence où les mots ou la danse représentent les seules issues. Si le spectacle n’est pas parfait, il provoque la réflexion et est souvent un pur plaisir pour l’oeil.
Jusqu’au 14 avril
À la Salle Fred-Barry
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