Chasseurs : Chasser les fantômes
Chasseurs, la nouvelle création d’Éric Jean, s’aventure dans de bien sombres paysages intérieurs.
Avec ce spectacle, le dernier à être présenté entre les murs de l’actuel Quat’Sous, il n’y a pas de doute, nous sommes bel et bien dans l’imaginaire fertile et inquiétant d’Éric Jean et Pascal Brullemans. Le metteur en scène et l’auteur de Chasseurs nous entraînent encore une fois sur un territoire aussi fascinant que déroutant. Cette fois, cependant, il faut avouer qu’on rencontre plus d’ombre que de lumière, plus de brouillard que d’éclaircies.
Dans le coeur d’une forêt, au bout de la nuit, six pieds sous terre… voilà où la représentation nous guide. Avec sa mère, Marlène (Dominique Quesnel), une femme qu’il vouvoie parce qu’il ne l’a pas vue depuis de nombreuses années, Walter (Benoît McGinnis) a décidé de remonter jusqu’à la racine du mal. Ensemble, la mère et le fils vont déterrer les morts, descendre aux enfers, se jeter plusieurs fois dans le vide, revenir aux sources amères de la vie avant la mort. Au bout du sentier, auront-ils pansé leurs plaies? Rien n’est moins sûr. Chasseurs est pour ainsi dire l’opposé de Corps étrangers, un lumineux spectacle créé au Mexique par le même tandem et présenté au Quat’Sous au début de la saison. Il y a, dans les deux créations, cet entremêlement des pulsions de vie et de mort, un amalgame qui nous semble si mexicain. Mais, dans Chasseurs, Éros et Thanatos procèdent à un bien sinistre commerce. Dans leurs orgies de drogue, de rêve, de sexe et de musique, les habitués du Chrysanthème, un bar situé en plein bois, s’échangent les rôles de prédateurs et de proies. Pour explorer le vide, ils se livrent à des jeux très dangereux.
Éclairé avec originalité par Jan Komarek, l’espace conçu par Magalie Amyot, croisement entre une fosse humide et une boîte de nuit, ne cesse pas un instant de fasciner. Ce n’est pas à Éric Jean que l’on va apprendre à créer des images, et Chasseurs en contient plusieurs très belles. Malgré cela, la représentation s’accroche inutilement – comme le spectateur – à des fragments de récit. On ne sait plus si on est là pour se faire raconter une histoire ou pour se laisser imprégner par les instantanés. Par conséquent, celui qui s’arrêtera d’intellectualiser dès les premières minutes risque d’effectuer un bien meilleur voyage.
Jusqu’au 19 mai
Au Théâtre de Quat’Sous
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