Le psychomaton : Les grandes espérances
Scène

Le psychomaton : Les grandes espérances

Le psychomaton d’Anne-Marie Olivier relate les efforts d’une caissière-philosophe dans sa volonté de changer le monde. Entre idéaux et réalité, fantaisie et sensibilité.

Josée (Hélène Florent), une caissière qui, à la suite d’un échec sentimental, a décidé de se consacrer à l’amour universel, cherche un moyen d’aider les gens, depuis son comptoir de station-service en basse-ville de Québec; dépanneur qu’elle considère d’ailleurs comme un "towing moral". Mais devant la difficulté de "statistiquer" l’effet de ses sourires, elle en vient à imaginer, avec son ami Polo (Hugues Frenette), un "patenteux" secrètement amoureux d’elle, le psychomaton, sorte de confessionnal électronique, répondant aux confidences de ses utilisateurs par une pensée du jour tirée d’un dictionnaire de citations. C’est ainsi que nous découvrons toute une panoplie de personnages (Érika Gagnon, Éric Leblanc et Édith Paquet) qui, par leurs traits surdimensionnés et leur langage coloré, nous font rire, tout en portant des drames souvent très durs et en soulevant des questions existentielles…

Après Gros et Détails, spectacle de contes urbains l’ayant fait connaître, Anne-Marie Olivier se lance dans l’écriture théâtrale, non sans demeurer assez proche de ses premières amours, alors que le monologue tient ici une place de choix, au gré d’une structure éclatée, servant bien sa réflexion sur l’isolement, la solitude, "l’incommunicabilité". Cela dit, l’ensemble n’en présente pas moins une belle cohésion, non seulement parce qu’à la manière des êtres humains en général, ses protagonistes partagent une même condition, un même espace, ou encore, que d’amusants et touchants liens se dessinent entre eux, mais surtout parce qu’ils font partie intégrante de l’univers si personnel de l’auteure, dont on retrouve avec bonheur les formules imagées ainsi que l’habile dosage entre humour et sensibilité, réalisme cru et fantaisie.

Quant à la mise en scène de Véronika Makdissi-Warren, elle réussit à matérialiser cet esprit si particulier en créant, à travers les déplacements des comédiens, des ambiances sonores évocatrices (Jean-Sébastien Côté) ainsi qu’un décor au diapason du style dramaturgique – par son aspect crado-poétique et sa multitude de détails familiers (Élise Dubé) – une véritable atmosphère de quartier, qui contribue également à l’unité de l’ensemble. Et c’est sans compter la fluidité avec laquelle elle nous fait passer d’une trame à l’autre, grâce notamment aux métamorphoses de l’ingénieux dispositif scénique ainsi qu’à la dynamique induite par le recours à la vidéo (Mario Villeneuve), dont ressort par ailleurs une intéressante imagerie. Bref, un tout supérieur à la somme de ses – nombreuses et diverses – parties.

Jusqu’au 5 mai
Au Théâtre Périscope
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