Mélanie Demers : Parle avec elle
Mélanie Demers présente le résultat d’une collaboration avec Boyzie Cekwana, figure de proue de la danse contemporaine sud-africaine. Une oeuvre où elle affirme sa signature tout en l’affinant.
Quand la directrice de Tangente lui a proposé de travailler avec un artiste étranger pour la série "Croisées", Mélanie Demers n’a pas hésité longtemps avant de choisir Boyzie Cekwana, rencontré au Kenya en 2005 à l’occasion d’une résidence de création. "Ce qui m’a probablement le plus touchée chez lui, c’est l’accumulation de toutes les influences dans son corps", raconte celle qui dansait depuis 1998 au sein de la compagnie O Vertigo tout en chorégraphiant ses propres pièces et qui, l’été dernier, a fait le saut de la création en artiste indépendante. "Après, c’est sa pensée sur sa danse, son art et sa responsabilité d’artiste qui m’ont séduite", dit-elle, le comparant à l’homme de théâtre Wajdi Mouawad pour la rigueur de sa démarche, la profondeur de son propos et son rayonnement local et international.
C’est donc en tant que conseiller et oeil extérieur que Mélanie Demers sollicite le chorégraphe sud-africain pour cette nouvelle création, qu’elle danse en duo avec Jacques Poulain-Denis, également compositeur de la trame sonore dont il manipule certaines séquences en direct sur scène. "Pour moi, c’est un projet d’apprentissage pour comprendre comment travailler de manière à pouvoir transmettre mes préoccupations, confie-t-elle. Je voulais que Boyzie me bouscule dans mes idées reçues et qu’il questionne les évidences tout au long du processus tant sur le plan du fond que de la forme, de l’emballage, de la facture du spectacle. Il a vraiment un talent pour ça."
Jamais Mélanie Demers n’a autant discuté pendant un processus de création ni aussi bien défini son propos avant de le mettre en gestes et en scène, épurant son style et clarifiant du même coup les rôles de chorégraphe et d’interprète qu’elle endosse successivement. Dans Les Angles morts, elle traite de tout ce qu’on préfère ne pas voir pour pouvoir survivre – les horreurs qui alimentent quotidiennement les actualités et celles que nos psychés préfèrent garder dans l’ombre – et de la résilience qui fait qu’on avance malgré tout et qu’on arrive même parfois à être heureux.
"On a beaucoup travaillé avec des accessoires comme des bottes de caoutchouc, de gros gants de travail ou des sacs de papier qu’on se met sur la tête comme s’il y avait une façon d’entrer en contact avec la réalité mais toujours en se protégeant, révèle la chorégraphe. C’est un peu comme faire l’amour avec un condom: tu es dans l’acte le plus intime mais avec un élément de protection. C’est un paradoxe, en fait."
Du 26 au 29 avril
À Tangente
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