Chris Salter et Michael Schumacher : Entre deux eaux
Scène

Chris Salter et Michael Schumacher : Entre deux eaux

Chris Salter et Michael Schumacher présentent une oeuvre électro-organique dans le cadre de la 8e édition du Festival Elektra. Intrigant.

Comment donner une respiration à un espace est la question de départ dont s’est servi l’artiste en arts médiatiques Chris Salter pour explorer la notion de seuil (Schwelle, en allemand), en faisant interagir le corps humain et un système technologique. Pour le deuxième volet de sa recherche, il collabore avec le danseur allemand Michael Schumacher qu’il dote de senseurs pour que sa gestuelle et son énergie influencent par moments le son et la lumière. Des cellules photoélectriques sont également placées dans l’espace, donnant ainsi à l’environnement une sorte d’autonomie, une capacité à réagir aux éléments qui le composent et l’habitent. L’expérience est aussi stimulante qu’inusitée pour celui qui dansa longtemps pour William Forsythe avant d’entreprendre une carrière en solo.

"Je n’ai jamais été autant en contact avec la technologie, commente Michael Schumacher. La première chose que ça change, c’est ma perception et ma compréhension du temps. Et aussi, ma capacité à ressentir tout ce qui compose l’environnement. Je suis particulièrement fasciné par la différence entre le temps biologique et le temps réel en dehors de mon corps." Le temps biologique, c’est celui des cellules qui meurent et qui se régénèrent à chaque seconde, celui des battements de coeur et des flux sanguins qui rythment simplement l’oeuvre du vivant. Un temps qui tourne en boucle, tandis que Cronos compte les heures qui conduisent à la fin du spectacle et, ultimement, à la mort.

Justement, les deux artistes s’intéressent aux états physiques et émotionnels vécus dans la transition entre la vie et la mort. Dans ce que les bouddhistes tibétains nomment le Bardo, cet entre-deux que l’on traverse juste avant de mourir ou de renaître et qui désigne aussi le temps de suspension entre l’inspiration et l’expiration. "On ne prend pas la mort au sens littéral mais plutôt métaphorique", précise le danseur qui passe de l’immobilité à la frénésie dans une improvisation très structurée où le vocabulaire gestuel et le type d’énergie sont choisis à l’avance pour chaque segment de la pièce. "Mais je danse toujours entre passé et futur parce que c’est ça la danse: c’est le mouvement qui trace une fine ligne entre le passé et le futur." C’est donc une fleur de présent différente qui nous est offerte chaque soir pour célébrer la fusion de l’humain et de l’environnement. Et malgré le caractère intellectuel de la démarche, on nous assure qu’elle est teintée d’humour.

Du 10 au 12 mai
À la Cinquième salle de la Place des Arts

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