Serge Postigo : Chanteur de charme
Serge Postigo se glisse tout naturellement dans la peau de Guido Contini, le héros de la comédie musicale Neuf.
Après Grease (1998) et Irma la douce (2002), Serge Postigo se lance avec un enthousiasme communicatif dans la création de Neuf, une comédie musicale de Maury Yeston et Arthur Kopit qui trouve son origine dans le 8 1/2 de Federico Fellini. Coproduit par le Théâtre du Rideau Vert et le Festival Juste pour rire, le spectacle est signé Denise Filiatrault, spécialiste en la matière.
En acceptant le rôle principal, Serge Postigo est en train de rejoindre, presque malgré lui, le clan sélect des acteurs-chanteurs: "J’ai cette grande chance qu’on me demande de faire des affaires que je n’ai jamais faites… et j’ai l’insouciance d’accepter!" Actif à la télévision et au cinéma, et même animateur à ses heures, le comédien, diplômé de l’École nationale de théâtre en 1993, n’hésite pas à réitérer son engagement envers les planches: "Le théâtre, c’est ma base, quelque chose qui m’anime énormément, que je chéris. Si je fais du théâtre, c’est par besoin!"
Quant à son intérêt pour la comédie musicale scénique, Serge Postigo se souvient très précisément du jour où il est né: "C’était Les Misérables, au St-Denis, avec Robert Marien. J’ai vécu un grand choc. J’ai commencé à brailler – ça a pris huit minutes – et sur le pont Champlain, en direction de chez nous, je braillais encore. Il y a quelque chose qui m’a heurté là-dedans. Quand tu prends une émotion, que tu la mets sur une musique et que tu envoies ça vers un spectateur, il ne peut pas se défendre. Personnellement, je n’ai aucune résistance à ça."
LES ANGOISSES DE LA CREATION
On parle souvent du défi pour un interprète d’intégrer le chant, la danse et le jeu. Pour y arriver, Postigo affirme s’agripper à la vérité de son personnage: "Pour un acteur, dans une comédie musicale, même si tu chantes plus ou moins bien, tant que ça part du ventre, ça marche. Si on sent que c’est vrai, on va tout te pardonner!" Guido Contini, le personnage incarné par Serge Postigo, est un réalisateur qui a tout pour être heureux. Seulement, comme il refuse obstinément de faire des choix, et ce, dans toutes les sphères de sa vie, Contini risque de tout perdre. Dans un spa vénitien où il comptait, grâce au calme, mettre fin à sa panne d’inspiration, l’homme est inopinément visité par les nombreuses et flamboyantes femmes de sa vie: sa mère (Marie-Denise Pelletier), son épouse (Estelle Esse), sa maîtresse (Émily Bégin), sa productrice (Karine Belly), sa productrice adjointe (Patsy Gallant), son actrice préférée (Catherine Sénart) et quelques autres.
Selon Yves Morin, qui signe la traduction et l’adaptation de Neuf, ces femmes sont les différentes facettes de Guido, leur présence expose les conflits intérieurs du personnage, sa psyché en ébullition: "C’est un spectacle qui parle des angoisses de la création, de la manière dont elle surgit du désordre et du chaos. La création est une source de vie qu’on ne peut atteindre qu’en acceptant de passer par une certaine mort." Ainsi, c’est dans les souvenirs de son enfance que Guido Contini va trouver la force de devenir l’adulte qu’il a toujours refusé d’être. Pour Serge Postigo, la quête de son personnage est ni plus ni moins celle de la maturité: "Guido trouvera le bonheur, retrouvera sa femme et son inspiration, le jour où il cessera de se cacher derrière l’enfant de neuf ans qu’il a été."
Du 15 mai au 16 juin
Au Théâtre du Rideau Vert
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DE L’ECRAN A LA SCENE
Le point de départ de Neuf, c’est bien évidemment le 8 1/2 de Fellini, un long-métrage mettant en vedette Marcello Mastroianni, Claudia Cardinale et Anouk Aimée. Sorti en 1963, le film s’attache au destin de Guido Contini, alter ego du cinéaste, aux prises avec une sérieuse crise de la quarantaine. Dans cette oeuvre couverte de prix, on goûte au génie du réalisateur, à son avant-gardisme, à l’onirisme et à la fantaisie qui ont fait sa marque, cet envoûtement qui opère magistralement dans Satyricon, Roma et Amarcord. Du film, Mario Fratti, dramaturge et critique de théâtre états-unien d’origine italienne, a fait une pièce. En s’appuyant sur elle, Maury Yeston (paroles et musique) et Arthur Kopit (livret) ont donné naissance à Nine, une comédie musicale créée à Broadway en 1982. Récipiendaire de quatre Tony Awards, le spectacle, mettant en vedette Raul Julia, a franchi le cap des 700 représentations. En 2003, Nine a eu droit à un revival sur Broadway, une production encensée dont Antonio Banderas était la tête d’affiche. En ce moment, histoire de boucler la boucle, on travaille à Hollywood à l’adaptation cinématographique de Nine. La sortie en salle est prévue pour 2009.