Christian Lapointe : Le feu aux poudres
Scène

Christian Lapointe : Le feu aux poudres

Christian Lapointe, auteur et metteur en scène de CHS, fait courir sa flamme sur le FTA.

Créé l’année dernière (en laboratoire) au Carrefour international de théâtre de Québec, CHS (pour combustion humaine spontanée) marque les débuts de Christian Lapointe, directeur du Théâtre Péril, en tant qu’auteur dramatique. Également acteur et metteur en scène, Lapointe est mû par le désir de ramener le spectateur le plus proche possible de sa condition humaine et de nommer l’indicible par le truchement de son théâtre. "Je trouvais que la combustion humaine spontanée était un thème très juste pour représenter l’irreprésentable, pour nous ramener à l’invisible que l’on veut faire apparaître au théâtre. On est dans un monde où l’on cherche constamment le sens des choses. Devant le mystère de la CHS – si cela existe -, c’est difficile de trouver un sens", affirme le jeune homme de 28 ans.

Christian Lapointe entretient une relation particulière avec le feu. Et pour cause. À l’âge de 19 ans, alors qu’il était cracheur de feu, il fut victime d’un grave accident qui le mena directement au service des grands brûlés. "J’entretiens avec le feu un rapport amour-haine, un lien différent d’avec les autres éléments. On se baigne dans l’eau, on marche sur la terre, on respire l’air. Le feu, c’est l’élément en dehors de nous, celui qui a créé tout ce que nous sommes aujourd’hui", confie-t-il. Cette fascination l’a poussé à écrire l’histoire d’un jeune homme suicidaire obsédé par l’idée de s’immoler par le feu, mais qui sera finalement emporté par la combustion humaine spontanée. CHS est une cantate à trois voix. Le principal protagoniste, incarné par Lapointe, se livre à un monologue, en plus d’entretenir des dialogues avec une femme dont l’identité demeure nébuleuse (Maryse Lapierre) et un scientifique qui égrène ses théories sur la CHS (Sylvio-Manuel Arriola).

"En réalité, explique Lapointe, une théorie a été acceptée par la communauté scientifique, mais elle est faillible parce que certains cas répertoriés de CHS ne correspondent pas à cette théorie. Ici, j’avance une théorie sur la CHS, mais je la défais à la fin du spectacle." Le créateur propose donc une trame narrative ouverte dans laquelle le spectateur peut choisir ses points d’ancrage et construire sa propre histoire. "Ces rapports au symbole du feu offrent un éventail, une multiplicité de sens qui permet de déborder du thème", dit-il à propos d’une pièce qui présente un côté humoristique et une écriture syncopée, qui rassemble une cinquantaine de petits fragments liés les uns aux autres, évoluant au gré d’un espace-temps hachuré. À travers cela, des projections montrent notamment des images d’archives de CHS.

ÉCRITURE SCÉNIQUE

Christian Lapointe parle de CHS comme d’un tableau vivant dans lequel les acteurs ne sont que des éléments. Il affirme: "Le mouvement n’est pas créé par les acteurs, mais par le découpage du texte. Dans ce sens, l’interprète est un passeur qui évoque la situation." Lapointe accorde une place primordiale à la mise en scène, qu’il perçoit comme un travail collectif et qu’il qualifie d’écriture scénique. "La pièce doit être rigoureusement écrite avec une logique et une cohérence internes, mais c’est au moment de l’écriture scénique que le texte se révèle vraiment et que l’histoire qui se trouve dans les mots surgit. L’écriture scénique va révéler l’essence et les sens du texte."

Voilà pourquoi Christian Lapointe s’est entouré du collectif Cinaps, petit noyau de créateurs dont il fait lui-même partie avec le scénographe Jean-François Labbé, du concepteur sonore Mathieu Campagna et de l’éclairagiste Martin Sirois. "L’apport de ces gens-là à l’objet théâtral lui-même, en dehors du texte, est énorme. En tant que metteur en scène, je rassemble ces concepteurs, mais je ne cherche pas à effacer leur signature. Ils s’expriment à part entière", conclut Lapointe.

Du 25 au 28 mai
À l’Espace Go (petite salle)