Anaïs Janin : Dans le miroir
Anaïs Janin, directrice de la Troupe Reflet, s’attaque à la pièce phare du théâtre absurde, En attendant Godot de Samuel Beckett.
Vladimir et Estragon attendent l’arrivée de Godot, qui a promis de les aider. Au milieu de nulle part, à côté d’un arbre, ils passent le temps comme ils le peuvent. Quand Pozzo, qui se dit maître de la colline et qui traîne en laisse son acolyte Lucky, va surgir, les deux clochards vont partager cette attente interminable avec lui.
Pour Anaïs Janin, fondatrice de la Troupe Reflet, les personnages de Beckett expriment quatre tonalités de la perte. "Même deux par deux, il n’y a que des dialogues de sourds. Chacun est emmuré dans son vertige, rejeté par sa société. Et au lieu de passer à l’action, ils sont tous suspendus dans l’attente de ce Godot qui va les sauver." C’est dans cette optique du déracinement que la créatrice a voulu souligner, par une mise en scène épurée, les failles particulières du quatuor. "Vladimir perd la mémoire, Estragon a perdu sa propre essence, il ne fait que dormir et manger. Pozzo n’a plus de valeurs ni de respect. Lucky, en tant qu’esclave, perd carrément son individualité." Plantés dans un décor minimaliste, où l’intonation et les silences ont beaucoup plus d’importance que les effets de geste ou d’esthétique, Marc Deschênes (Estragon), Luc Vincent (Pozzo), Félix Tardif (Lucky) et Érick Plante (Vladimir) campent des êtres pris dans un lieu flou où tout ce qui compte est de ne pas être seul, peu importe avec qui.
Un peu comme les personnages de la pièce, les membres de la Troupe Reflet se sont trouvés réunis par hasard, si ce n’est par l’amour du théâtre, après avoir répondu à une petite annonce placée par la metteure en scène. Il en a résulté un réel processus collectif de création où chaque comédien a dû s’approprier son personnage et le faire vivre à sa façon. "Je crois que le regard de Beckett sur l’homme est un bon miroir de notre société. La communicabilité est toujours un problème entre les êtres humains." Une invitation, donc, à aller se reconnaître un peu… dans le miroir de la Troupe Reflet.
Du 8 au 17 juin
Au Studio-théâtre du pavillon J.A. De Sève de l’UdeM
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