Rick Miller : Du monde à la messe
Scène

Rick Miller : Du monde à la messe

Le comédien Rick Miller nous parle de Bigger than Jesus, un spectacle solo qu’il a écrit avec le metteur en scène Daniel Brooks et créé il y a quatre ans à Toronto. Messe profane.

L’idée de Bigger than Jesus, qui sera présenté pour la première fois en français à l’occasion de Théâtres d’ailleurs, a germé dans l’esprit de Rick Miller (collaborateur de Robert Lepage, notamment) alors qu’il interprétait le rôle-titre de Jesus Christ Superstar. "Je trouvais ça intéressant de voir la réaction du public après le spectacle, commente-t-il. C’était comme s’ils voulaient que je sois Jésus ou une rock star, comme si on avait besoin de croire en quelque chose, de s’offrir à une idée ou à une personne plus grande que soi." Sur un plan plus personnel, il s’interrogeait par ailleurs quant aux motivations de sa mère, très religieuse. Pour lui, s’intéresser à cette question était en quelque sorte une façon de se rapprocher d’elle. Ce qui ne l’a pas empêché d’adopter une perspective profane. "Comme plusieurs personnes, je trouve que l’Église n’a pas beaucoup de rapport avec ce que je sens du monde, fait-il valoir. Mais les traditions religieuses ont quand même beaucoup à offrir si on les prend pour les valeurs qu’elles véhiculent plutôt que pour leurs textes sacrés qu’il faut interpréter à la lettre. À mon sens, c’est la source de beaucoup de problèmes dans le monde. Au contraire, nous, on cherche à ouvrir un dialogue entre les cultures, à voir si les fois religieuses ne pourraient pas se trouver un terrain d’entente. On essaie de faire un portrait moderne de Jésus, séparé de la doctrine, du dogme; de mettre en relief ce qu’il y a de profond et d’universel dans son histoire. Puis, à la fin de tout ça, de dégager un lien entre le théâtre et la religion." Ce lien résidant, selon lui, dans le rituel et la communion.

C’est ainsi qu’en collaboration avec Daniel Brooks, il a imaginé un spectacle multimédia prenant la forme d’une messe. "La scène est blanche, avec un écran et un plancher blancs, note-t-il. L’idée, c’est qu’au début, on efface tout ce qui a été construit autour du mythe chrétien pour bâtir quelque chose de nouveau. On joue beaucoup avec les caméras, qui représentent un peu l’oeil omniprésent de Dieu, et on manipule l’image de façon très précise pour créer des petits miracles de théâtre." Cela alors qu’il interprète plusieurs personnages, manipule des marionnettes et va jusqu’à chanter, de manière à présenter son sujet sous le plus d’angles possible. "On peut l’approcher de façon académique, raisonnable, alors on a un professeur qui donne un cours sur comment les évangiles se sont développés, commence-t-il. Il y a aussi le côté passionné des preachers à la télévision, qui ont un charisme énorme, sont très séduisants, puis l’aspect mystique, mystérieux, cosmique et, finalement, tout ce qui concerne la culture populaire, parce que, là, Jésus est un peu partout: dans South Park, dans une comédie musicale d’Andrew Lloyd Weber, etc. Mais malgré toutes nos intentions plus sérieuses, on a beaucoup de fun. C’est d’ailleurs un autre mot qui relie la religion et le théâtre: l’esprit. Pour nous, the spirit, ça se trouve dans la connexion entre des personnes sur scène et dans le public, et ça passe aussi par le rire. C’est un gars qui tripe, qui s’amuse, qui explore…" Quant à sa mère, s’il est vrai qu’elle a trouvé l’ensemble plutôt dérangeant, "elle sait aussi qu’être un peu brassé, c’est bon pour la santé", conclut-il.

Les 9 et 10 juin à 20 h
À la Caserne Dalhousie
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