Gad Elmaleh : La vie vue d'en haut
Scène

Gad Elmaleh : La vie vue d’en haut

Gad Elmaleh a manqué la 24e édition du Festival Juste pour rire à cause d’une blessure. Histoire de se faire pardonner, l’humoriste français nous offre Papa est en haut, son tout nouveau spectacle, en grande primeur.

Gad Elmaleh voulait baptiser son nouveau spectacle d’une expression qui collerait parfaitement à son contenu: "Pour moi, Papa est en haut, c’est un truc un peu mystique, qui veut dire: papa est au ciel. Ça veut aussi dire: papa a du succès, mais c’est toujours ton papa; papa a envie d’avoir une carrière au top, mais il reste un papa." L’humoriste français d’origine marocaine n’avait pas l’intention de présenter Papa est en haut en grande primeur au Québec, mais quand il a su que plusieurs de ses compatriotes, qui ont comme lui participé au Festival Juste pour rire au cours des dernières années, fêteraient cet été les 25 ans de l’événement, il a eu un pincement au coeur: "J’ai décidé de participer moi aussi, mais je ne voulais pas présenter mon ancien spectacle, L’Autre, c’est moi. Je me suis donc mis en deuxième vitesse pour terminer l’écriture de Papa est en haut."

UNE PRIMEUR "ÉPROUVÉE"

Que le public se rassure toutefois, l’humoriste n’arrive pas à Montréal avec un one man show à moitié construit, puisqu’il a rodé ses nouvelles blagues au cours des derniers mois dans le cadre d’une tournée à travers la France: "Je ne voulais pas prendre le public québécois pour des cobayes. On peut par conséquent dire que le spectacle dans son intégralité, 100 % tout nouveau, sera présenté à Montréal avant même de l’être à Paris (en décembre à l’Olympia)."

Même s’il n’en fait pas de cas, le fait de présenter Papa est en haut en primeur au Québec a dû comporter son lot de difficultés, notamment sur le plan de l’adaptation. L’humoriste estime néanmoins que cela ne lui a pas trop compliqué la vie: "C’est vrai qu’il y a de l’adaptation, mais elle n’est pas énorme car mes observations sont assez universelles. Ce n’est pas comme si je parlais seulement d’hommes politiques connus en France et pas au Québec." Il faut aussi dire que la Belle Province n’est pas un terrain complètement inconnu pour l’humoriste qui a vécu parmi nous pendant cinq ans avant de s’installer en France, en 1992: "J’adapte en fonction de là où je joue, et ayant vécu au Québec, je connais bien la mentalité et la vie québécoises. C’est ce qui me permet de trouver le ton juste, sans basculer dans les clichés."

CASSER LES CLICHES

Dans Papa est en haut, Gad Elmaleh, lui-même père, aborde une foule de thèmes tirés de ses réflexions sur la vie: "Mes observations ont notamment pour objectif de casser les clichés au sujet de la notoriété. Je propose aussi une série d’observations sur les jeunes papas qui sont tiraillés entre un désir de réussite sociale et la volonté d’être un papa présent, alors que ce n’est pas possible du tout. Il se crée dans ce contexte des formes de culpabilité, de sorte que quand tu es face à ton enfant, tu ne peux pas être naturel, tu n’oses pas l’engueuler quand il fait des bêtises. Tu crois même que Mickey peut tout arranger, alors tu l’emmènes à Disney, mais Mickey, il ne peut pas régler les problèmes de tout le monde."

La musique est encore une fois un important pilier du spectacle, tout comme c’était le cas dans L’Autre, c’est moi, à la différence près que cette fois, un piano se trouvera aussi sur scène: "Je voulais être chanteur et pianiste et je ne l’ai pas été, alors j’ai introduit la musique dans mon spectacle par le biais du rire." C’est ainsi que Gad Elmaleh a décidé de s’attaquer au répertoire du plus québécois des chanteurs, Gerry Boulet. Avec son accent québécois hilarant, l’humoriste a choisi de parodier le grand succès de Boulet, Les Yeux du coeur. Car, il faut le dire, l’humoriste a le don d’inclure des expressions et des mots à la mode, des formules qui touchent leur cible à tous coups. Il assure que son seul truc pour choisir les expressions qui font mouche, c’est de rester attentif à ce qui se passe chez nous: "J’ai encore beaucoup de contacts et d’amis au Québec. Et puis, pour moi, l’accent est une observation que je dirais musicale. Les clichés ne m’intéressent pas. Je trouve jouissif de reproduire un accent comme si c’était vraiment les gens de là-bas qui parlaient."

Outre son accent québécois, l’une des grandes forces de l’humoriste est sa rapidité à absorber l’énergie du public pour se lancer dans de succulentes improvisations inspirées du moment présent: "Je me nourris de ça. Au moment où je vous parle, je m’apprête à prendre la route pour jouer au Havre. Quand je vais entrer en voiture dans la ville, je vais déjà m’imprégner de ce qui s’y passe. Les spectacles ne sont pas faits sur mesure, ils sont ancrés dans la réalité de chaque public. Je m’imprègne complètement du public pour créer une interaction entre lui et moi. Sans l’interaction, ça ne m’intéresse pas. Je ne veux pas être un concertiste." Élu en janvier dernier l’homme le plus drôle de l’année par la chaîne TF1, Elmaleh affirme que la nouvelle l’a beaucoup fait rire: "C’est flatteur, mais ça ne veut rien dire. Ce n’est pas comme si j’étais un sportif et que j’avais fait un super temps au mille mètres. C’est sympa, mais il ne faut pas le croire."

C.V.
Gad Elmaleh, né en 1971, quitte son Casablanca natal à l’âge de 17 ans pour venir étudier les sciences politiques à Montréal. C’est en 1992 qu’il s’installe à Paris afin de suivre la formation du Cours Florent pendant deux ans et demi. Gad entreprend sa carrière d’humoriste en 1995 en présentant son premier one man show, intitulé Décalages. Il est suivi en 2001 et 2005 des spectacles La Vie normale et L’Autre, c’est moi, dont les DVD connaissent encore un grand succès. Parallèlement à sa carrière sur scène, l’humoriste fait du cinéma. Sa filmographie comprend une vingtaine de titres, dont Salut cousin! (1995), Vive la République! (1997), L’Homme est une femme comme les autres (1997), La Vérité si je mens! 2 (2000), À + Pollux (2001), La Doublure (2006) et Hors de prix (2006). On peut dire que parmi tous les personnages qu’il a incarnés sur scène, celui de Chouchou, un travesti d’origine maghrébine, est l’un des préférés du public. Ce n’est donc pas un hasard s’il s’est retrouvé en 2003 au coeur d’une comédie éponyme. La même année, il a remporté le prix Coup de coeur du public au Festival Juste pour rire. L’an dernier, il a eu l’occasion de présenter L’Autre, c’est moi aux États-Unis. Au cours des prochains mois, l’humoriste va se concentrer essentiellement sur son métier de stand up puisque la tournée de Papa est en haut doit se poursuivre pendant un an et demi.