Francis Veber : Damer le Pignon
Scène

Francis Veber : Damer le Pignon

Francis Veber, auteur du Dîner de cons, nous parle de cette pièce mondialement connue, grâce notamment à son hilarante adaptation filmique et à son inénarrable antihéros. Remix.

Le Théâtre Voix d’Accès (Cuisine et Dépendances, Un petit jeu sans conséquence, J’aime beaucoup ce que vous faites et Début de fin de soirée) nous revient cet été avec Le Dîner de cons de Francis Veber, ce scénariste et réalisateur à qui on doit entre autres Le Jouet, La Chèvre, Les Compères, Les Fugitifs et Le Placard. Coïncidence frappante, celui-ci s’apprête également à reprendre la pièce à Paris, au mois d’août, dans une version remaniée intégrant certains éléments du film. Un principe que le metteur en scène, Renaud Paradis, avait lui aussi choisi de privilégier. Résultat: nous aurons pour notre part droit à un mélange de ces deux propositions, visant à ne conserver que la crème de la crème des différents textes.

Mais quel a donc été l’élément déclencheur de cette comédie à l’humour impitoyable et au rythme infernal, dont le producteur Alain Poiret n’a pas hésité à acheter les droits alors que seul le premier acte était écrit – et avec raison puisque le film allait cumuler plus de neuf millions d’entrées en France? "C’est un jeu qui, paraît-il, s’est joué à Paris à l’époque d’un night-club tenu par Jean Castel, raconte l’auteur. Ce dernier a lancé la rumeur qu’il organisait des dîners de cons et, je ne sais pas si ça a réellement eu lieu, mais beaucoup de monde prétend y avoir participé… Pas en tant qu’invités, évidemment! Moi, ça m’avait un peu fasciné cette histoire, la cruauté de ces gens qui invitaient un brave bougre pour se moquer de lui sans qu’il le sache, et je me disais: "Il faut punir un de ces types.""

C’est ainsi qu’il a imaginé monsieur Brochand, "un homme sur le berceau duquel les fées se sont penchées, observe-t-il. Il est beau, riche, a une maison d’édition qui marche fort, un appartement superbe, une belle femme…" Jusqu’à ce qu’"il se trouve un con, alors là, hors concours tellement il est bête, et le jour où il le reçoit pour le tester un peu avant de l’amener dîner, il a un lumbago et sa femme le quitte, ce qui fait que son unique confident est un homme qu’il a choisi pour sa connerie", résume-t-il.

Ce nigaud, c’est François Pignon, un nom qu’il a déjà donné à sept de ses personnages. "Mais il s’agit d’une étiquette sur un produit différent à chaque fois", précise-t-il. N’empêche, celui-ci demeure toujours un bon diable, comme il a d’ailleurs eu l’occasion de le faire remarquer à un de ses homonymes – ils sont 11 en France, réunis en association et ayant même tenté de l’empêcher d’utiliser leur nom. "Ce n’est pas Hitler, ce n’est pas Staline, a-t-il plaidé. En fait, vous êtes un homme merveilleux dans mes films!" Bien sûr, on ne peut nier que ses Pignon soient gentils, "dangereux, mais gentils"; cependant, ce qui le frappe à propos de celui du Dîner de cons, "c’est qu’il est beaucoup plus manipulateur qu’on l’imagine; c’est ce qui est intéressant. Les gens ne sont jamais noirs ou blancs; ils sont plus ambigus que ça". Une qualité dont il cherche constamment à enrichir ses personnages, qu’il considère, dans ce cas précis, particulièrement difficiles à interpréter. À Marie-Frédérique Auger, Emmanuel Bédard, Vincent Champoux, Jean-Michel Déry et Nicolas Létourneau, maintenant, de relever le défi…

Jusqu’au 1er septembre
Au Théâtre Petit Champlain
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