Rhapsodie-Béton : Invasions barbares
Scène

Rhapsodie-Béton : Invasions barbares

Le Théâtre de la Marée Haute provoque un rire jaune grâce à l’humour noir de Rhapsodie-Béton, une comédie grinçante de Georges Michel.

Qui n’a jamais été témoin ou victime d’une agression verbale ou physique? Qui n’a jamais dû endurer la musique d’un voisin qui se défonce les tympans (et défonce les nôtres par ricochet)? Après Kvetch, pièce que le Théâtre de la Marée Haute a présentée l’année dernière et qui abordait le thème de l’angoisse, la jeune compagnie explore avec Rhapsodie-Béton un phénomène criant d’actualité: la violence urbaine.

C’est le soir. Charlotte et Pierre (Marie-Ève Trudel et Sébastien Dodge) reçoivent Catherine (Marie-Claude Giroux), une vieille connaissance, ainsi que Jacques et Françoise (Stéphan Allard et Christelle Juteau), un couple d’amis. Au cours du repas et de la discussion, les silences et les malaises surgissent fréquemment, alors que, barricadés dans l’appartement, les convives sont sans cesse interrompus par les manifestations bruyantes d’une violence extérieure. Sans pour autant y accorder une grande importance (on s’habitue à tout…), les cinq amis décident toutefois, dans un élan d’humanité, d’écrire un manifeste pour dénoncer la barbarie dont ils sont témoins, victimes et… acteurs. Incapables qu’ils sont de s’entendre sur les mots à employer, le projet échoue. Mais ils devront réagir lorsque la barbarie défoncera leur porte et que les non-dits voleront en éclats.

Les comédiens interprètent avec talent ces personnages prisonniers d’une violence qui grignote de minute en minute leur espace vital, un décor de laine minérale, de dalles de béton et de porte blindée signé Geneviève Lizotte et Elen Ewing. Marie-Ève Trudel se distingue dans le rôle d’une femme au bord de la névrose, obnubilée par la bienséance. Sébastien Dodge et Stéphan Allard ont l’art de jouer les machos finis et de laisser échapper des phrases pleines d’un cynisme sans nom.

Un texte mordant, donc, où silence et paroles s’enchaînent à un rythme que le metteur en scène Michel-Maxime Legault a su doser. Toutes les deux minutes, une sirène retentit, une sonnette fait sursauter, un cri annonce un drame. Un procédé dramatique parfois répétitif, mais qui, la plupart du temps, dresse un portrait de société qui dénonce habilement (par la caricature et le cynisme) l’inconscience, la résignation, les préjugés, la promiscuité assassine, une obsession du bien paraître et un état perpétuel de tension susceptible de nous pourrir la vie quotidienne.

Jusqu’au 29 septembre
À l’Espace Geordie
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