Encore une fois, si vous permettez : Un bonheur
Encore une fois, si vous permettez, de Michel Tremblay, nous convie à un émouvant théâtre de la mémoire.
Retrouvailles, sur scène, d’un fils avec sa mère, Nana, qui revit grâce à la mémoire, en cinq tableaux révélant leur affection. Très largement inspirée de la relation de Michel Tremblay avec sa mère, la pièce présente aussi, à travers ces personnages, tous les fils, toutes les mères, leurs discussions, leurs inquiétudes, leurs rires, leurs souvenirs. Vif témoignage de l’amour de Tremblay pour sa mère, la pièce apparaît en même temps comme un hommage au théâtre. À ses oeuvres – savoureux prologue -, à ses acteurs – touchante tirade sur Huguette Oligny -, mais aussi au théâtre du quotidien, dans lequel excelle Nana, douée pour le drame et la caricature.
La mise en scène de Louise Laprade, sobre et sensible, prolonge cet hommage, à travers choix esthétiques et direction d’acteurs. Au centre du plateau, une surface rectangulaire délimitant l’espace de jeu – celui du souvenir -, un rideau comme fond de scène, un coffre. Derrière, en transparence, l’univers de la mère disparue, où la laisse repartir son fils, une fois son souvenir terminé. Là se jouent les scènes entre mère et fils, petits événements de tous les jours que transfigure la fantaisie de Nana. Théâtrale, Nana l’est par ses exagérations, son art de la manipulation, bien visibles dans le jeu de Louison Danis: gestes appuyés, diction empruntée par moments, dans une volonté ironique, regards en coulisse, pour mesurer ses effets. La théâtralité est également soulignée, à certains moments, par l’éclairage, les costumes et l’utilisation du décor.
Daniel Simard et Louison Danis, très complices, interprètent ce duo avec un plaisir évident et une grande profondeur. Daniel Simard incarne finement celui pour qui chaque parcelle de souvenir est un trésor; en face, Louison Danis est tout simplement magnifique. D’une drôlerie inouïe, d’une invention folle, elle devient aussi, par moments, bouleversante. Et toujours, déborde d’une énergie, d’un enthousiasme qui embrasent le plateau et toute la salle.
Le souvenir, comme le théâtre, est ici le baume ultime: permettant de revivre des moments précieux, mais aussi, en quelque sorte, de les repriser un peu. Ainsi se rejoignent, dans la scène finale, théâtre et souvenirs, pour clore le spectacle sur une image lumineuse, d’une beauté poignante.
Jusqu’au 13 octobre
Au Grand Théâtre
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